• Marionnette et politique:

    censure, propagande, résistance

     

    Journées professionnelles de la marionnette à Clichy, 3 et 4 février 2012, proposées par le Clastic théâtre et Themaa.

     

    La marionnette a souvent été l'objet d'une surveillance étroite de la part des pouvoirs politiques et religieux. Les représentations ont pu être interdites, les œuvres mutilées, les artistes pourchassés, emprisonnés et parfois exécutés. L'art de la marionnette rencontre aussi la censure sur un autre terrain, celui de la confrontation aux tabous: parce qu'elle n'est qu'une figure artificielle, il lui est plus facile de représenter irreprésentable, les puissances du fantasme ou plus simplement les territoires de l'intime. A ce titre la marionnette joue avec nos propres censures, elle les déjoue et nous invite à poster un autre regard sur l'humain et ses frontières. Là aussi, elle est un puissant révélateur de ce qui est permis ou non de dire et de montrer, dans l'espace public.

    Censure est la sanction, l'interdiction d'une pièce théâtrale. Normalement il y a abolition de la censure au théâtre en Europe, mais quand il y a « trouble à l'ordre public », un préfet peut toujours interdire une pièce. La censure qui ne dit pas son nom, c'est un prétexte pour arrêter les pièces qui dérangent, c'est plaire au pouvoir, ou pas plaire...

    En Chine, avec la révolution culturelle, les marionnettes sont brulées et les mains des marionnettistes deviennent abimées en cassant des cailloux dans les mines.

    La marionnette est liée à la structure religieuse et la pensée magique.

    C'est un vrai coup aux arts traditionnels. Un effort violent de couper le lien avec le passée, avec cette idée de « toute puissance » de l'humain.

    Actuellement tous les arts sont durement surveillés. La censure amène à l'absence de la créativité qui est remplacer par une vraie virtuosité, un perfectionnement au niveau technique. Le respect absolu du maître conduit le marionnettiste à une auto-censure qui ne lui donne pas le droit de dépasser son maître. Les pièces sont une répétition de l'œuvre du maître, qui fonctionne comme modèle. Cet attachement, ce respect absolu au maître fait bloquer la créativité, l'invention du nouveau.

    Au Tibet, les spectacles joués disparaissent avec l'arrivée du communisme chinois.

    En Moldavie, pendant la dictature, (1920-40), la marionnette, les habits, les textes sont censurés. Il est interdit d'exprimer une émotion. Les marionnettes sont utilisées comme propagande par le parti, le théâtre devient pédagogique et politique. De 1945 jusqu'à 1990, il n'y a que deux genres de spectacles, les contes et les légendes héroïques, avec une dramaturgie médiocre. L'objectif est de garder un public ignorant avec un langage spécifique qui contient un message: dire aux enfants où elle est la vérité et où le mensonge. Le héros, bon, fort et moral est un exemple à imiter... Il provoque le clivage dans le psychisme et il donne un modèle montré comme la seule possibilité à suivre.

    Dans les écoles, l'accent est mis sur la perfection du geste et leur philosophie est celle du parti communiste. Les élèves deviennent l'instrument de cette idéologie. Les acteurs sont démunis de toute improvisation et souvent le texte est enregistré, si non, il y a danger à l'intonation ironique, aux expressions... Tous les risques sont pris en compte et contrôlés. Seulement à la fin du XIX siècle, la prononciation du texte est permise en Russie. Les artistes étaient des fonctionnaires payés par l'état. Moscou imposait les pièces et le personnage de Petrouska disparaît pour réapparaitre en Moldavie, après son indépendance en 1991, (au début la Moldavie appartient à la Roumanie ensuite à la Russie) .

    En France après la 2ème guerre mondiale, les spectacles scolaires sont censurés. L'objectif demandé est le calme des enfants, la dramaturgie et les thèmes sont imposés parce qu'ils devaient servir aux maîtres et à l'enseignement pédagogique.

    D'ailleurs l'église auparavant utilise la petite Marie, (marionnette), en jouant au sein de l'église les contes bibliques. Si la marionnette ne vise leurs objectifs c'est bien l'œuvre du diable et elle est interdite.

    A Cuba, île clé au plein milieu de Caraïbes, le 1959 la révolution gagne; le statut donné aux artistes est celui du fonctionnaire qui travaille pour l'état. Aux années 1971-75, (décennies noirs), apparaît le concept de « paramétration ». Les artistes qui ne suivent pas les paramètres ils sont recardés. Ils recevaient alors un télégramme qui les convoquaient à une réunion où le parti décidait leur futur métier, c'est à dire: éboueurs, fossoyeurs, chasseurs de crocodiles...

    1960-70: (les années de silence)

    1970: L'art de la marionnette fleurit.

    En 1973: Pépé viré il est interné dans un hôpital psychiatrique. Il réussit à faire du théâtre pour les fou. Plusieurs artistes sont internés en structure psychiatrique, d'autres tombent dans la dépression. Les chemins de l'art et de la folie encore une fois s'entremêlent.

    Les marionnettes sont brulées et jetées dans les poubelles. Les enfants les récupèrent, ils mélangent les matériaux et les marionnettes peuvent rejoué.

    Il y interdiction des rencontres avec d'autres marionnettistes, argentins,...

    La marionnette est utilisée pour la propagande, didactique, les spectacles sont une leçon de morale pour apprendre aux enfants de n'est pas voler, ne pas mentir...

    Maintenant il y a quelques troupes de marionnette mais l'art manque d'oxygène. Ils en parlent mais le trauma est là et la souffrance se fait sentir. Les spectacles sont peu variés, où la valeur la plus importante est la maîtrise du jeu.

    En Iran la censure est toujours là. C'est difficile d'avoir un discours contre les armes. C'est difficile de dépasser les clichés (pourquoi le personnage n'a pas de barbe) et le clivage (tous ceux qui ont un chapelet sont des bons). C'est une honte de toucher une femme marionnettiste en plein jeu. Elle doit être voilée. Faut être d'accord avec eux et dire que la guerre est bonne, une merveilleuse technologie, faute d'arrêter le travail, qui n'aboutit jamais. Les artistes ne répètent pas la pièce avant d'avoir l'autorisation officielle. Tous ces textes, les théâtres, les lieux de répétition appartiennent au parti, ils sont partout dans les lieux publics et chacun a un rôle spécial.

    Les artistes n'ont pas le droit de rêver de l'humanité, de l'exprimer, ils doivent se conformer aux « normes » d'une réalité horrible, si non, ils risquent leur vie.

    A Togo, (Afrique de l'ouest), les marionnettes sacrées s'appellent « tsitsili ». Les masques et les marionnettes doivent rester en conformité avec le mythe. La marionnette représente un fétiche qui symbolise l'esprit des ancêtres, afin de protéger la communauté. Dans les cérémonies de danse ce sont les dieux, les revenants qui créent à travers les hommes qui rêvent. Les marionnettes représentent les ancêtres mythiques qui reviennent et protègent de la maladie.

    L'art agit sur la vie collectif et ce n'est pas un jeu individuel. Il y a deux sources d'inspiration l'esthétique et l'inconscience.

    Au Nigeria, l'intolérance religieuse met tout en péril. Les gens croient que le jeu des marionnettes est satanique. Cet ignorance devient une vraie menace pour l' artiste qui pour préserver son intégrité s'autocensure. L'artiste a le choix ou d'abandonner ou de résister contre les interdits et les intolérances religieuses. L'état ne donne plus les fonds pour créer des marionnettes et une période même elles étaient interdites.

    Au Sénégal les marionnettes n'existent pas traditionnellement. Patricia Gomis (création ) et Marcia De Castro (mise en scène), nous montre le spectacle, « Moi... Messieurs, Moi... », dans un objectif qui n'est pas de changer des choses mais de prendre la parole et se poser des questions. Les gens ont peur de parler, ils n'osent pas critiquer de peur de la punition divine. Dans une ambiance légère avec beaucoup de l'humour, sous le support de la danse, mime, marionnette, chant, la comédienne raconte le sort des enfants en Afrique, en passant par l'excision qui est interdite au Sénégal, mais elle se pratique encore aux alentours. C'est une coutume ancestrale, pratiquée par les grandes mères, qui cache la croyance que la femme est « sale » et que le seule moyen de la purifier c'est de se mutiler et d'anéantir le plaisir féminin, afin de devenir pure et apte de faire des bons enfants...

    Le spectacle fait découvrir la position des enfants Africains, (comme un colis changent des parents, des maisons et des pays et nous prenons conscience que l'esclavage existe encore en France.

    Tout ça nous ramène violemment à nous qui, d'une part, nous essayons de mesurer notre responsabilité comme marionnettistes et d'autre part expliquer l'autocensure faite sur nous mêmes.

    Il faut dire que les œuvres en Afrique sont collectives (œuvres des esprits), et pas d'un particulier.

    Au Sénégal les masques et les marionnettes sont disparues, (sauf les masques au sud).

    Au Nigeria les marionnettes ont survécues, au Mali et au Burkina les marionnettes servent à des rites bien spécifiques liés au sacré.

    En Mauritanie le spectacle va surement être censuré parce que l'excision se pratique encore et l'islamisme gouverne.

     

    Conclusion

     

    Le spectacle est un langage théâtral qui fait sens. On doit avoir des stratégies d'adaptation et de retournement et continuer à expérimenter le théâtre de résistance.

    On voit bien que les limites se posent par des pouvoirs politiques et sociales. Qui décide de ces limites?

    On doit être vigilants à cette notion de fragilité de la démocratie, ce qu'on observe se passer aujourd'hui.

    Il faut pas déplacer systématiquement le problème chez l'autre, on doit pratiquer l'introspection.

    Parce que la censure est le pouvoir de l'autre sur moi. Ça peut être un pouvoir financier, (subventions), esthétique, (codes, cases et habitudes), ou celui de la supériorité des personnes qui sont supposées savoir, aptes à commander leur pont de vue. Et là où ces pouvoirs peut devenir conscients, on se penche sur le phénomène de l'autocensure. Là les limites se posent par nous mêmes, par notre éducation, nos tabous, nos propres limites.

    Le marionnettiste se met des limites sur son propre corps, il se cache derrière le castelet, il se cache derrière l'anonymat, afin de mieux symboliser et ainsi dévoiler son humanité à travers le langage théâtrale.

    La marionnette permet la transgression des interdits. Ce pour cela qui est surveillée de près et censurée à plusieurs reprises.

    Réfléchissons ensemble sur ces questions et continuons à résister en conscience.

     


    1 commentaire
  • Οι καλλικάντζαροι είναι μικρά πλάσματα σαν διαβολάκια και τρώνε όλα τα γλυκά των Χριστουγέννων

    Αν ακούσετε ποτέ για λυκοκατζαραίους, σκαλικατζέρια, καρκαντσέλια, κωλοβελόνηδες, βερβελούδες, παγανά, πλανήταρους, καλλισπούδηδες, ζούζουλα και άλλα περίεργα ονόματα, να ξέρετε πως ανήκουν όλα σ' αυτά τα περίεργα πλασματάκια του κάτω κόσμου, που λέμε καλικάντζαρους (1)...

    Κάποτε που οι άνθρωποι είχαν μάτια και καρδιές μεγαλύτερες, μπορούσαν και τα έβλεπαν αυτά τα «κακανθρωπίσματα», αλλά και σήμερα, κανείς μην αποκλείσει το ενδεχόμενο, μέρες σαν κι αυτές, να βρεθούν ξαφνικά μπροστά σας…, γιατί, μέρες σαν κι αυτές, αυτά τα «κακοχρονισμένα» αφήνουν τη δουλειά τους στον κάτω κόσμο και ξεχύνονται στη γη, για να παιδέψουν τους ανθρώπους…!

    Όλο το χρόνο, με τα σκυλόδοντά τους ροκανίζουν, κάθε μέρα ασταμάτητα, τον χοντρό κορμό του δέντρου που στηρίζεται η γη. Δαγκώνουν, ξύνονται πάνω του, τον γδέρνουν με τα νύχια τους και προσπαθούν με μανία να τον κόψουν, «να πέσει η γης να ψιχουλιαστεί, στάχτη και πούλμπερη να σκορπίσει στους τέσσερους αγέρηδες» (2)

    Από του Χριστού όμως ως τα Φώτα, για δώδεκα ημέρες ακριβώς, όλος ο συρφετός, μαζί με τις πιο «διάσημες… προσωπικότητές» τους: τον Κωλοβελόνη, ψηλόλιγνο σα μακαρόνι, τον Μαντρακούκο, φοβερό αρχηγό, τον Κοψαχείλη, με τα τεράστια κοφτερά δόντια, τον Παρωρίτη, με μύτη μακριά και μαλακιά σαν προβοσκίδα, τον Παγάνα, με τα κουνελίσια αυτιά, τον Τρικλοπόδη, με το χταποδίσιο χέρι του που κάνει τον κόσμο να περδικλώνεται επάνω του, τον Σιφώτη, με τη στρογγυλή μούρη, τον Καταχανά, που «βρωμάει και ζέχνει», τον Μαλαπέρδα, που κατουράει σύκα, σοδειές και φαγητά…(!!) τον Τρικέρη και τον Μαλαγάνα, που ξεγελούν τα παιδιά και τους αρπάζουν τις λιχουδιές, τον Βατρακούκο, που μοιάζει με γιγαντιαίο βάτραχο, τον Μαγάρα, με την τουμπανισμένη κοιλιά που…καταλαβαίνετε τι μπορεί να κάνει και βρωμάει ο τόπος γύρω του…, τον Κατσιπόδη ή Κατσιποδιάρη, με το τραγίσιο πόδι, τον Γουρλό, με τα γουρλωμένα μάτια, τον Στραβολαίμη, τον κουτσό και καμπούρη Κοψομεσίτη, τον Περίδρομο, τον Βραχνά και τον Ξεφτέρη (3), ξεχύνονται στη γη, με στριγκλιές και ξεφωνητά κι «αρχίζει το πανηγύρι»…

    Χώνονται στις καμινάδες και τρώνε τα γλυκίσματα των νοικοκυραίων, κατατρομάζουν τις μαμές που νυχτώνονται στις ερημιές, πειράζουν τους μυλωνάδες και τους μυλωνούδες, το ρίχνουν σε ξέφρενο χορό και αρπάζουν τους περαστικούς μαζί τους, μέχρι να τους εξουθενώσουν και να πέσουν σκασμένοι κάτω, μαγαρίζουν το σιτάρι και το αλεύρι, κατουρούν στη χόβολη του τζακιού, τρώνε πράγματα αηδιαστικά και εμετικά: φίδια, σαύρες, χελώνες και βατράχους (ο αγαπημένος τους μεζές), ρίχνουν τσιγκέλια απ’ τα τζάκια, όσο αυτά καίνε και δεν μπορούν να μπουν μέσα, μπας και αρπάξουν κανένα λουκάνικο ή καμιά τηγανίτα…, ενώ κάποιοι είπαν ότι κυνηγούν και πνίγουν τα αβάπτιστα μωρά ….Και τι δεν κάνουν…!

    Άλλοι πανύψηλοι κι άλλοι μικροσκοπικοί, άλλοι κουτσοί, άλλοι στραβοχέρηδες, μονόφλθαμοι ή με κόκκινα μάτια, με μαλλιά αγκαθωτά και λιγδιασμένα κι άλλοτε φαλακροί, με τεράστια γαμψά νύχια και θεόστραβα πόδια τραγίσια που τρεκλίζουν και μπερδεύονται μεταξύ τους, ντυμένοι με κουρέλια κι άλλοτε θεόγυμνοι, άλλοτε γυναίκες σα μαϊμούδες (οι λεγόμενες βερβελούδες), το γένος τον καλικάντζαρων ζει και βασιλεύει! Τρυπώνει στις ζωές μας κάθε παραμονή Χριστουγέννων και δε φεύγει παρά μόνο όταν βαφτιστούν τα νερά, στα "Φώτα"...

    Γι’ αυτό και φεύγοντας, στις 6 του Γενάρη, κλαψουρίζουν:

    «Φεύγετε να φεύγουμε,
    γιατί έρχεται ο τρελόπαπας
    με την αγιαστούρα του
    και με τη βρεκτούρα του
    και θα μας αγιάσει
    και θα μας μαγαρίσει»

    Λένε πως κάποιοι τους είδαν καβάλα σε γαϊδάρους να τριγυρνούν σε πόλεις και χωριά κι άλλοι να αναρριχώνται με απίστευτη ευκολία στα παράθυρα και να πηδούν από στέγη σε στέγη…. Όπως και να ‘χει σημασία έχει ότι, μέρες σαν κι αυτές, είμαστε στο έλεός τους…Μη φοβάστε όμως, γιατί τα πλασματάκια αυτά μπορεί να είναι αποκρουστικά στη όψη κι όταν τα δείτε να σας “κόψουν τη χολή”, αλλά στην πραγματικότητα είναι χαζούλικα (τα περισσότερα τουλάχιστον…) κι εύκολα μπορείτε να τα ξεγελάσετε

    Αν θέλετε λοιπόν να τα εμποδίσετε να μπουν στο σπίτι σας και να σας τα κάνουν «γης Μαδιάμ», βάλτε ένα κόσκινο έξω απ’ την πόρτα σας. Τα ανόητα αυτά τερατάκια, μόλις το δουν θα θελήσουν να μετρήσουν τις τρύπες του…Έλα όμως που δεν μπορούν να πουν το 3 (ο αριθμός τρία είναι ιερός, βλ. Αγ. Τριάδα). Αρχίζουν λοιπόν το μέτρημα: 1, 2, …Μέχρι εκεί! Το τρία δεν το λένε και φτου κι απ’ την αρχή...: 1, 2 και ξανά 1, 2…Κι έτσι θα μείνουν εκεί με τις ώρες και με τις μέρες, να απασχολούνται, χωρίς τελικά να μπουν μέσα….Μόνο ένας μπορεί να σας τη σκάσει...ο Κωλοβελόνης…

    Ο Κωλοβελόνης είναι λεπτός και ψηλός σα μακαρόνι, τόσο λεπτός μάλιστα που μπορεί να τρυπώνει απ’ τις κλειδαριές αλλά και να περνά μέσα απ’ τις τρύπες του κόσκινου… Είναι ο μόνος λοιπόν που δε χάνει την ώρα του μετρώντας. Έτσι σουβλερός όπως είναι, περνά μέσα απ’ το κόσκινο κι ύστερα απ’ την κλειδαριά και ...τσουπ… εμφανίζεται μπροστά μας…!

    Ο πιο επικίνδυνος απ’ όλη την ομάδα δεν είναι παρά ο Μαντρακούκος. «Κουτσός, κοντόχοντρος, τραγοπόδαρος, με καραφλό κεφάλι κι ασκημομούρης» (4), αυτός είναι ο Αρχηγός. Μάλλον συγγενεύει με κάποιο αρχαίο απαίσιο ον, τον βυζαντινό «Βαβουτζικάριο» (5), ενώ για όλ’ αυτά τα τέρατα γενικότερα, λέγεται ότι κρατούν από αρχαίες δοξασίες, όπως οι "κύρες", οι ψυχές δηλαδή που ανέβαιναν στη γη, όσο διαρκούσαν τα Ανθεστήρια, προς τιμήν του Διονύσου, φέρνοντας μπελάδες στους ανθρώπους (6).

    Λέγεται επίσης συμβολίζουν τις ψυχές των πεθαμένων που έρχονται και βασανίζουν τους ζωντανούς (7), λαϊκή δοξασία πράγματι τόσο ισχυρή, ώστε οι άνθρωποι, ήδη από τα αρχαία χρόνια, προκειμένου να εξευμενίσουν αυτές τις ψυχές, ετοίμαζαν, ως προσφορά, "μελιτόεσσες", μικρές μελόπιτες, πιθανοί πρόγονοι των "μελομακάρονων" (8).
    Άλλοι πάλι λένε ότι τα μωρά που γεννήθηκαν ανήμερα τα Χριστούγεννα ή τη βδομάδα μεταξύ Χριστουγέννων και Πρωτοχρονιάς είναι καταραμένα και γι’ αυτό παίρνουν τη μορφή καλικάντζαρου. Το τι βασανιστήρια περνούσαν αυτά τα καημένα τα παιδάκια, στα πολύ παλαιότερα χρόνια, όπου η δοξασία αυτή ήταν έντονη, δε λέγεται…!! Τους έκαιγαν τα πέλματα των ποδιών τους και ειδικά τα νύχια τους, γιατί έλεγαν πως «όταν από τη φλόγα της φωτιάς καψαλιστούν και καούν τα νύχια του, δεν μπορεί να γίνει καλικάντζαρος χωρίς νύχια» (9)…!!
    Παρόμοια δοξασία είναι και αυτή του γερμανικού λαού για την Perchta, η οποία εμφανίζεται, το δωδεκαήμερο, να ακολουθείται από ένα πλήθος αβάπτιστων νηπίων και θεωρείται ως ο οδηγός της φάλαγγας των ψυχών, τις οποίες βοηθά στην επάνοδο τους στη γη (10).

    Πάντως, αν ποτέ υποψιαστείτε ότι κάποιο τέτοιο τερατάκι, χαρχαλεύει έξω απ’ το σπίτι σας και φοβηθείτε, θυμηθείτε τους παλιούς…:

    - βάλτε στην πόρτα σας καλούδια για να το γλυκάνετε και κόσκινο, για να το καθυστερήσετε..!

    - θυμιατίστε ή ζωγραφίστε σταυρό στην πόρτα!

    - κρεμάστε στο τζάκι (όσοι έχετε, αλλιώς στο φωταγωγό…ξέρετε ) γουρουνοσάγονο ή κάψτε ξύλο από αχλαδιά ή αγριοκερασιά - καθώς λένε ότι τα αγκαθωτά δέντρα απομακρύνουν τα δαιμονικά όντα - το λεγόμενο χριστόξυλο!

    - μην ξεχνάτε πως φοβάται πολύ τον πετεινό και ειδικά όταν αυτός λαλήσει 3 φορές… (Αν καταφέρετε και στριμώξετε κανέναν στο μπαλκόνι σας, φωνάξτε μας να το δούμε.. )

    - κάψτε παλιά ρούχα και παπούτσια δερμάτινα…! Δεν αντέχουν τη μυρωδιά του καμένου δέρματος!

    Τέτοια και άλλα τεχνάσματα - που μπορείτε να τα βρείτε γραμμένα... (11) - μας θυμίζουν παρόμοια των αρχαίων προγόνων μας που περιέζωναν με κόκκινο νήμα τα ιερά τους ή άλειφαν με πίσσα τις πόρτες των σπιτιών τους, για να εμποδίσουν την είσοδο των ψυχών στους ναούς (12).
    Λένε πάντως ότι όποιος καταφέρει να δέσει με λινή κόκκινη κλωστή από το πόδι έναν καλικάντζαρο, τότε θα τον έχει δούλο του για πάντα...

    1. κατά τον Φ.Κουκουλέ,"Καλλικάντζαροι"Λ.,τ.Ζ',1923,σελ.315επ. το όνομα προέρχεται από τη λέξη "κάνθαρος"(=σκαθάρι) που το Μεσαίωνα ονομαζόταν και "κάντζαρος". Οι γεωργοί παρομοίαζαν τα σκαθάρια με δαιμονικά όντα, επειδή έβλαπταν τη σοδειά τους. Για άλλες απόψεις βλ.Πολίτη, "Παραδόσεις Β΄", εκδ. Γράμματα, 1994, σελ324επ.
    2. Στρατή Μυριβήλη, «Τα Παγανά» (1944)
    3. Βλ. σελ77 επ., Στρατή Μολίνου, «Οι Καλλικάντζαροι», εκδ.Φιλιππότη, 1996
    4. σελ.251, Ν.Πολίτη, «Παραδόσεις Α΄», εκδ. Γράμματα, 1994
    5. βλ. πάντως Ν.Πολίτη, "Παραδόσεις Β΄", ο.α., σελ.333
    6. βλ. Γ.Μ.Μέγα, "Ελληνικές Γιορτές και Έθιμα της Λαϊκής Λατρείας", εκδ. Εστιά, 2004, σελ. 53, 59-60, ο οποίος πιστεύει ότι αυτές τις ψυχές του Κάτω Κόσμου συμβολίζουν οι καλικάντζαροι, σε αντίθεση με τον Ν.Πολίτη, "Παραδόσεις Β΄", ο.α., σελ.332, ο οποίος πίστευε ότι οφείλουν οι καλλικάντζαροι την ύπαρξή τους στις μεταμφιέσεις του Δωδεκαημέρου, που φόβιζαν τον κόσμο και είναι επομένως νεότερα λαϊκά δημιουργήματα. Βλ. επίσης Κ.Θρακιώτη, "Λαϊκή Πίστη &Λατρεία στη Θράκη",εκδ.Ρήσος,1991,σελ.222
    7. σχετική η δοξασία των Φαρασιωτών της Καππαδοκίας για τους "μνημοράτους", Γ.Μ.Μέγα,ο.α,σελ.53,59-60
    8. βλ. σχετικά και στο άρθρο: «Να τα πούμε;» στη στήλη «Αλόη» του MusicHeaven.
    9. βλ. Ν.Πολίτη, «Παραδοσεις Α΄», ο.α., σελ. 243
    10. βλ. Γ.Μ.Μέγα, ο.α., σελ. 59 Πρβλ. έθιμο της Βοιωτίας που λέει πως τα μωρά που πεθαίνουν αβάπτιστα "τρώνε τη μάνα τους", αν ταφούν, πριν σαραντίσει η λεχώνα, ενώ σε άλλες χώρες λένε πως γίνονται νάνοι, λύκοι, στρίγκλες κ.α. βλ. Ν.Πολίτη, "Παραδόσεις Β΄", ο.α., σελ.345 και επίσης Μέγα, ο.α., σελ59
    11. βλ. Ν.Πολίτη,"ΠαραδόσειςΑ', ο.α.,σελ.242 επ.
    12. βλ. Γ.Μ.Μέγα, ο.α., σελ. 53

     
    Μαντρακούκος (Πηγή: βιβλίο: "Αερικά-Ξωτικά και Καλικάντζαροι" του Θ.Βελλούδιου. Το έργο είναι του Γ.Γλιατά)

    atlantas

    Dec 24 2007, 01:04 PM

    Ποιοί είναι;

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΜΑΛΑΓΑΝΑΣ
    Ο Μαλαγάνας θέλει πολύ προσοχή γιατί ξεγελάει τα παιδιά με γλυκόλογα και έτσι καταφέρνει να τους παίρνει τα γλυκά .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΤΡΙΚΛΟΠΟΔΗΣ
    Ο Τρικλοπόδης έχει χταποδίσιο χέρι που το χώνει παντού και σκουντουφλάνε πάνω του οι άνθρωποι . Του αρέσει πολύ να μπερδεύει τις κλωστές από το πλεχτό της γιαγιάς .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΠΛΑΝΗΤΑΡΟΣ
    Ο Πλανήταρος πλανεύει τους ανθρώπους γιατί μπορεί να μεταμορφώνεται σε ζώο ή σε κουβάρι .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΜΑΛΑΠΕΡΔΑΣ
    Του Μαλαπέρδα του αρέσει να κατουράει και στα φαγητά την ώρα που μαγειρεύονται . Γι’ αυτό όσες νοικοκυρές τον ξέρουν φροντίζουν να κλείνουν καλά το καπάκι της κατσαρόλας τους.

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΜΑΓΑΡΑΣ
    Ο Μαγάρας έχει μια κοιλιά σαν τούμπανο και αφήνει βρομερά αέρια πάνω στα φαγητά των ανθρώπων .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΒΑΤΡΑΚΟΥΚΟΣ
    Ο Βατρακούκος είναι θεόρατος και ολόιδιος βάτραχος .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΑΤΑΧΑΝΑΣ - ΠΕΡΙΔΡΟΜΟΣ
    Ο Καταχανάς τρώει διαρκώς και τα πάντα . Ρεύεται και βρομάει απαίσια .
    Ο Περίδρομος είναι ο άλλος φαταούλας της παρέας .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΟΥΛΟΧΕΡΗΣ
    Ο Κουλοχέρης είναι σαραβαλιασμένος , μ’ ένα χέρι κοντό κι ένα μακρύ , κι όλο μπερδεύεται και πέφτει κάτω.

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΠΑΡΩΡΙΤΗΣ
    Ο Παρωρίτης έχει μύτη σαν προβοσκίδα και πολύ μαλακή . Εμφανίζεται λίγη ώρα πριν λαλήσει ο πετεινός , αξημέρωτα , κι έχει μανία να παίρνει τις φωνές των ανθρώπων .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΓΟΥΡΛΟΣ
    Ο Γουρλός έχει τα μάτια του τεράστια σαν αυγά και πεταμένα έξω . Φυσικά δεν του ξεφεύγει τίποτα .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΟΨΟΜΕΣΙΤΗΣ
    Ο Κοψομεσίτης είναι κουτσός κα καμπούρης και πιο πολύ απ’ όλους τους άλλους καλικάντζαρους του αρέσουν οι τηγανίτες με το μέλι .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΣΤΑΒΟΛΑΙΜΗΣ
    Το χαρακτηριστικό του Στραβολαίμη είναι ότι στριφογυρνάει διαρκώς σα σβούρα το κεφάλι του .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΟΨΑΧΕΙΛΗΣ
    Του Κοψαχείλη τα δόντια είναι τεράστια και κρέμονται έξω από τα χείλη του . Του αρέσει να κοροϊδεύει τους παπάδες και γι αυτό φορά συνήθως ένα ψεύτικο καλυμμαύκι .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΩΛΟΒΕΛΟΝΗΣ
    Ο Κωλοβελόνης είναι μακρύς σαν μακαρόνι κι έτσι μπορεί εύκολα να περνάει από τις κλειδαρότρυπες κι από τις τρύπες του κόσκινου . Είναι ιδιαίτερα σβέλτος και γρήγορος στις κινήσεις του . Λένε πως ίσως ο Κωλοβελόνης να έχει ουρά που καταλήγει σε βέλος .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΜΑΝΤΡΑΚΟΥΚΟΣ
    Μαντρακούκος ή Πρώτος ή Κουτσός .

    Αυτός ο αρχικαλικάντζαρος την ημέρα κρύβεται στις μάντρες και τη νύχτα βγαίνει και πειράζει τις γυναίκες που περπατούν στο δρόμο . Είναι κοντόχοντρος , τραγοπόδαρος , καραφλός , ασχημομούρης , πιο πολύ απ’ τους άλλους και πολύ επικίνδυνος .

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΠΑΓΑΝΟΣ
    Παγανός ή Πρώτος ή Μεγάλος .

    Η αφεντιά του είναι κουτσός . Λένε μάλιστα πως τον κούτσανε μια κλωτσιά από το γαϊδούρι της Μάρως , μιας χωριατοπούλας που την κυνηγούσε κάποτε ο Παγανός για να την κάνει γυναίκα του , αλλά αυτή κρύφτηκε στα σακιά με το αλεύρι που είχε φορτωμένα στο γαϊδούρι της και κατάφερε να του ξεφύγει . Ο Παγανός έτρεξε μανιασμένος κοντά στο γαϊδούρι και την έψαχνε . Το ζωντανό τότε τρόμαξε τόσο πολύ που άρχισε να κλωτσάει . Μια δυνατή φαίνεται πως έφαγε ο Παγανός και σακατεύτηκε . Ο Παγανός λατρεύει τη στάχτη και γι’ αυτό τρυπώνει από τις καμινάδες . Φοβάται όμως πιο πολύ απ’ όλους τους Καλικάντζαρους τη φωτιά και γι’ αυτό οι νοικοκύρηδες φροντίζουν να μη σβήσει κατά τη διάρκεια του δωδεκαήμερου . Ρίχνουν μάλιστα και αλάτι που κάνει θόρυβο όταν πέσει στη φωτιά , για να τον τρομάξουν ακόμα περισσότερο.

    • ΚΑΛΙΚΑΝΤΖΑΡΟΣ ΚΑΤΣΙΚΟΠΟΔΑΡΟΣ
    Κατσικοπόδαρος ή Κατσιποδιάρης ή Μέγας Καλικάντζαρος .
    Η μεγαλειότητά του είναι φαλακρός και κασιδιάρης κι έχει ένα κατσικίσιο ποδάρι . Είναι κακορίζικος , ελεεινός και γρουσούζης. Όπου βάλει το κατσικίσιο του ποδάρι φέρνει καταστροφή .


    Παροιμίες
    Αυτός γεννήθηκε στην «εποχή των καλικαντζάρων». Λέγεται για άτομα άτολμα και ευθυνόφοβα (Μακεδονία).


     

    Ονομάζουμε Δωδεκαήμερο ή Δωδεκάμερο (έτσι το λένε και οι άλλοι Χριστιανικοί λαοί: les Douze Jours, The Twelve Days, I Dodici Giorni) την περίοδο των 12 (στην πραγματικότητα 13) ημερών και νυχτών, από την παραμονή των Χριστουγέννων έως το πρωί του Αγιασμού (6/1).
    Στο διάστημα αυτών των ημερών, τα ειδωλολατρικά και χριστιανικά έθιμα συνυπάρχουν ειρηνικά και τελούνται με παραδοσιακή ένταση.


     


    Σύμφωνα με τις δοξασίες, σε αυτές τις 12 μέρες παρατηρείται μια κυριαρχία των κακών πνευμάτων στη γη.

    Οι
    Καλλικάντζαροι σε εμάς, οι λυκάνθρωποι, οι δράκοντες και οι μάγισσες στους ξένους λαούς, είναι οι κυρίαρχοι της νύχτας και της υπαίθρου και εχθρεύονται, ή ζηλεύουν, την οικογενειακή ζωή. Πολιορκούν σχεδόν τα σπίτια και χαίρονται να μολύνουν κάθε είδος από την τροφή και την ενδυμασία τους.
    Ο φόβος για τους Καλλικάντζαρους έκανε τους ανθρώπους να μεταχειρίζονται διάφορα μέσα για να τους κρατήσουν μακριά από τις κατοικίες, με κυριότερο αυτό της φωτιάς.

     

    Γι’αυτό η φωτιά στο τζάκι έκαιγε μέρα και νύχτα, όλο το Δωδεκαήμερο.
    [Την παραμονή των Χριστουγέννων κάθε νοικοκύρης έφερνε στο σπίτι του ένα χοντρό ξύλο, κομμένο από δέντρο αγκαθωτό (αχλαδιά, αγριοκερασιά). Τα αγκαθωτά δένδρα, κατά τη λαϊκή αντίληψη, απομακρύνουν τα δαιμονικά όντα. Το κούτσουρο αυτό λέγεται
    Χριστόξυλο ή Δωδεκαμερίτης.]
    Επίσης, έκαιγαν λιβάνι ή αλάτι στη φωτιά, ή κρεμούσαν ένα κατωσάγονο χοίρου στην καμινάδα.
    Άλλοι θέλοντας να τους εξαπατήσουν -μια και οι Καλλικάντζαροι θεωρούνταν κουτοί- έδεναν στο κρικέλι της πόρτας ένα σκουλί λίνάρι (ώσπου να μετρήσει ο δαίμονας τις ίνες του λιναριού, θα λαλούσε ο πετεινός).

    Μια όμορφη ιστορία: Ο Γιώργης και το καλικαντζαράκι μας διηγείται το blogaki.

    Τα χριστουγεννιάτικα, λοιπόν,
    έθιμα είναι κατ’εξοχήν «εστιακά». Ο χώρος που τελεσιουργούνται είναι η εστία, τόσο με τη συγκεκριμένη έννοια της φωτιάς και του τζακιού, όσο και με την ευρύτερη σπιτική που σχετίζεται με τη συνοχή των μελών της οικογένειας και τις ευετηρικές τους προσδοκίες για υγεία, ευτυχία, ευτεκνία, καλή παραγωγή κτλ.

    Πρωταγωνίστρια με πολυσήμαντο και πολυδιάστατο ρόλο, υπεύθυνο για τις ενδοοικιακές εργασίες, τις συγκεντρώσεις και την προετοιμασία για τις εορτές είναι η γυναίκα (μητέρα – σύζυγος – πεθερά – νύφη – κόρη – αδελφή). Οι εορταστικές ενέργειες αφορούν στην εστία, στα γεύματα και τη φιλοξενία.

    Κύριο μέλημα της νοικοκυράς ήταν να διατηρηθεί άσβεστη η
    εστιακή πυρά, όπου γύρω της μαζεύονταν όλα τα μέλη της οικογένειας, από το βράδυ της παραμονής των Χριστουγέννων. Εκεί έκαναν τις σπιτικές τελετές τους, πριν ξημερώσει για την εκκλησία (το πάντρεμα της φωτιάς ή την σπονδή με το κρασί και την κουλούρα της γωνιάς). Περνούσαν έτσι και τις άλλες βραδιές, κουβεντιάζοντας και τρώγοντας «ευκαρπιακές» λιχουδιές. Η νοικοκυρά χαιρόταν να βλέπει τη συγκέντρωση των δικών της και να ακούει το χαρούμενο «μιληταριό» που θα έχανε, όταν θα περνούσαν οι Γιορτές.


     

    Τα γεύματα έπρεπε να είναι πλουσιοπάροχα ακόμη και για την πιο φτωχή οικογένεια. Με τα χοιρομαγειρέματα (από τα τελετουργικά χοιροσφάγια), ή τη βραστή όρνιθα/πετεινό, έως τα Χριστόψωμα, που ήταν ο βασικός άρτος της γιορτής (και που συχνά φιλοτεχνούσαν οι λεγόμενες ψωμοκεντήστρες) και τα διάφορα γλυκούδια.

    Για τη Ζακυνθινή Κουλούρα και τους Συμβολισμούς της γράφει η Κική στο Hungry for life.

    Η
    φιλοξενία είναι η πηγή για τα πολλά γλυκίσματα του Δωδεκαημέρου. Η διάθεση για προσφορά και κεράσματα στους ξένους, αλλά και στους σπιτικούς, απορρέει από την αγάπη και τη στοργή και αποβλέπει στην καλοσύνεψη των πνευμάτων και την ευχή για μια γλυκαμένη ζωή.


    Η νοικοκυρά φρόντιζε και για το στολισμό του σπιτιού με μια απλή πρασινάδα (μυρτιά, δάφνη, κουμαριά) και πορτοκάλια στα πιάτα και στα παράθυρα. Ήταν ένα σύμβολο της χαράς για τη μετάβαση από τη χειμωνιάτικη περίοδο και το σκοτάδι, στο ανοιξιάτικο φως και τη βλάστηση. Αυτά με τον καιρό αντικαταστάθηκαν από το έλατο.


    Το δέντρο των Χριστουγέννων έχει σαν έθιμο βαυαρική προέλευση. Πρώτη φορά στολίστηκε στην Αθήνα στα ανάκτορα του Όθωνα το 1833.
    Η ελληνική νησιωτική παράδοση, κυρίως επηρεασμένη από τον πολιτισμό της θάλασσας, στόλιζε καραβάκι. Το καράβι συντρόφευε, σαν φαναρένιο φωτισμένο τεχνούργημα, τα κάλαντα των παιδιών στα Νησιά. Αντίστοιχα, τα παιδιά της στεριάς και των βουνών τεχνουργούσαν φωτισμένη βυζαντινή εκκλησία, που την έλεγαν Αγιά Σοφιά.
     

     

    [φωτ. Γιάννη Μαργαρίτη] 


    Τα Κάλαντα (κάλανδα, κόλιαντρα, καλήμερα των Χριστουγέννων, της Πρωτοχρονιάς, των Θεοφανείων) είναι ευχετικά και επαινετικά τραγούδια για την οικογένεια και το σπιτικό και συγχρόνως η μελοποιημένη αφήγηση του γεγονότος της ημέρας. Κύριοι και θαυμάσιοι συνεχιστές, με την προθυμία της αγνότητας και τη διάθεση της γνωριμίας με τις χαρές της ζωής είναι πάντοτε τα παιδιά που συνήθιζαν να κρατούν και ένα καλαθάκι για τα «φιλέματα». Τα φιλέματα στην ελληνική ύπαιθρο ήταν κυρίως γλυκά: δίπλες στην Πελοπόννησο, ξεροτήγανα στην Κρήτη, δάκτυλα στην Κύπρο, λουκουμάδες στη Σαλαμίνα, αλλά και ξηροί καρποί, κουραμπιέδες ή μελομακάρονα. Από τα πιο συνηθισμένα φιλοδωρήματα ήταν τα «κόλιντρα», μικρές κουλούρες από σιτάρι ή κριθάρι. Η αμοιβή των καλανδιστών δεν είναι ούτε φιλανθρωπία, ούτε ζητιανιά, αλλά πράξη τελεστική.

    Περισσότερα για τα κάλαντα γράφει η
    witch of daffodils σε σχετική καταχώρηση: Τα κάλαντα, λίγη ιστορία...

    Ενώ στο «Άκουσον Άκουσον» του
    Γεράσιμου Μπερεκέτη μπορείτε να κατεβάσετε Κάλαντα Πρωτοχρονιάς της Ρόδου.

    Η ημέρα της Πρωτοχρονιάς, εναρκτική, διαβατήρια και ως εκ τούτου κρίσιμη είναι το κλειδί για την είσοδο και την πορεία στην ευτυχία ή στη δυστυχία. Για το λόγο αυτό τα πάντα με τον νέο χρόνο πρέπει να αρχίσουν καλά, ευνοϊκά και ευοίωνα. Η προσοχή στρέφεται κυρίως σε μερικές πράξεις και ενέργειες που είναι δυνατόν να εξασφαλίσουν την ευτυχία, όπως το καλό ποδαρικό, τα διάφορα διατροφικά σύμβολα (καρύδια, ρόδια, αμύγδαλα κ.α.), τα γλυκίσματα, τα καλοπιάσματα, οι ευχές κλπ. Πολλοί, ακόμη και σήμερα, κρεμούν στην πόρτα μποτσίκι (άγρια κρεμμύδα).

     Σχετικά με τη βασιλόπιτα, η παράδοση αναφέρει ότι όταν ο Μέγας Βασίλειος ήταν επίσκοπος στην Καισάρεια, ο τότε έπαρχος της Καππαδοκίας θέλησε να εισπράξει φόρους. Οι κάτοικοι ζήτησαν την προστασία του ποιμενάρχη τους και εκείνος τους προέτρεψε να συγκεντρώσουν ό,τι πολύτιμα αντικείμενα είχαν, ώστε να δώσουν αυτά στον έπαρχο. Στη συνάντηση που ακολούθησε ήταν τέτοια η εντύπωση που προκάλεσε η παρουσία του μεγάλου Ιεράρχη, που ο έπαρχος δεν απαίτησε τίποτα. Όταν ο Μέγας Βασίλειος θέλησε να αποδώσει πίσω τα αντικείμενα, διέταξε να φτιάξουν «πλακούντια», δηλαδή μικρές πίτες, και μέσα στην κάθε πίτα έβαλε ένα ένα τα αντικείμενα. Όταν τα μοίρασε στους χριστιανούς ο καθένας βρήκε ό,τι είχε προσφέρει.
    Το έθιμο όμως του
    εορταστικού άρτου (ευετηρική προσφορά) και των μειλιγμάτων (εξευμενιστική προσφορά προς τους νεκρούς και τα επίφοβα πνεύματα) το συναντάμε και στα ρωμαϊκά Σατουρνάλια και στα ελληνικά Κρόνια.
    Στη βασιλόπιτα με τις
    μερίδες που ξεχωρίζονται για το Χριστό, τον Αγιο Βασίλειο (κατά τη λαϊκή πίστη, ο Άγιος είναι ακόμη ζωντανός και επισκέπτεται κάθε σπίτι για να φιλευτεί) η πίτα έχει κιόλας αγιαστεί. Από την αγιασμένη αυτή πίτα έριχναν μπουκιές στα χωράφια και στα δέντρα για να καρπίσουν, τάιζαν τα ζώα για να είναι γερά και οι ανύπανδρες κοπέλες έβαζαν κάτω απ’το μαξιλάρι τους και παρακαλούσαν τον Άγιο να τους δείξει στο όνειρο τον γαμπρό. Το κομμάτι του φτωχού είναι η εξιλέωση και η εξουδετέρωση του φθόνου για τα αγαθά του συμποσίου. Το μοίρασμα της πίτας σε ίσια κομμάτια με το νόμισμα στο ζυμάρι είναι μια συμβολική κατανομή της «μοίρας», δίκαιης όπως το θέλει ο άνθρωπος, για τη συμμετοχή του στο αβέβαιο μέλλον.

    Τα Θεοφάνια είναι για τον λαό μεγάλη γιορτή, θεότρομη, επειδή τότε αγιάζονται τα νερά και φεύγουν τα παγανά. Την έννοια του καθαρμού και της απαλλαγής από την επίδραση των δαιμονίων του Δωδεκαημέρου είχαν και μερικές άλλες συνήθειες, όπως το άναμμα μεγάλων φωτιών, το σταύρωμα του σπιτιού με κεριά των Φώτων κτλ. Αγίασμα από τον Μεγάλο Αγιασμό έφερναν και στα σπίτια τους και έπιναν από αυτό όλοι. Ακόμη, ράντιζαν με ένα κλαδί όλους τους χώρους του σπιτιού, καθώς και τα χωράφια και τα αμπέλια, για να τα προφυλάξουν από ασθένειες.

     
    Λίμνη Βουλιαγμένη, Ηραίο. Πέρασμα στον Κορινθιακό.
    [φωτ.
    Γ.Χ.]

    Βασικό, λοιπόν, στοιχείο των εθίμων του Χριστουγεννιάτικου Δωδεκαημέρου, είναι ο εξορκισμός ή η ευλόγηση του χρονικού
    περάσματος από το παλιό στο νεώτερο στάδιο. Από το λίγο φως του φθινοπωρινού ηλιοστασίου, στο περισσότερο του χειμερινού. Από το πέσιμο των φύλλων και της γήινης στειρότητας στην ελπιδοφόρα αναβλάστηση και από τις διαψευσμένες ελπίδες μας του παλιού χρόνου, στις πιθανότερες επιτυχίες του επόμενου. Όλα είναι αναγεννητικά και αυτήν τη σημασία παίρνει και η ίδια η γιορτή της γέννησης του βρέφους Χριστού, ιδιαίτερα στην Υμνογραφία μας. Αναγεννητικό γίνεται και το τέλος του Δωδεκαημέρου, με τον Αγιασμό και τα Θεοφάνια, τα λουσμένα στο νερό και το φως.

    Ακόμη ένα ποστ για το Δωδεκαήμερο και τις Γιορτές του από τον Θοδωρή Γούτα.

    Ο Δεκέμβριος είναι ο δωδέκατος και τελευταίος μήνας του ηλιακού μας έτους, αλλά ο δέκατος μήνας, όπως το λέει και το όνομά του (εκ του λατινικού decem = δέκα), από την πρωτοχρονιά της 1ης Μαρτίου, όταν το έτος των Ρωμαίων ήταν δεκάμηνο.

    Στο Αττικό αρχαιοελληνικό ημερολόγιο ήταν ο έβδομος μήνας και ονομαζόταν «
    Ποσειδεών» ή «Ποσειδών» (16 Δεκ. – 15 Ιαν.), προς τιμήν του θεού της θάλασσας Ποσειδώνα. Αυτόν τον μήνα σύμφωνα με τις δοξασίες των Αρχαίων Αθηναίων, ο Ποσειδώνας με την Τρίαινά του, το σύμβολο της δυνάμεως και εξουσίας, συντάρασσε τις θάλασσες και προκαλούσε μεγάλες τρικυμίες όταν θύμωνε μαζί τους' γεγονός που φοβούνταν ιδιαίτερα για τα ταξίδια τους οι ναυτικοί.

    Ως προς την πλευρά της αυστηρότητας ο Ποσειδών μπορεί να συσχετιστεί ως θαλασσινός θεός –προστάτης της θάλασσας– με τον δικό μας Άγιο Νικόλαο, ο οποίος τον αντικατέστησε στην πίστη του λαού. Οι Χριστιανοί ναυτικοί μας θεωρούν ότι οι δύσκολες ώρες της θάλασσας οφείλονται στον θυμωμένο άγιο Νικόλαο που είναι αγριεμένος μαζί τους. Για να τον εξευμενίσουν ρίχνουν στα τρικυμισμένα νερά λάδι από το καντήλι του Αγίου, κόλλυβα από αυτά που στέλνουν στην εκκλησία την ημέρα της γιορτής του, ψίχουλα, άρτο ή και μια μικρή εικόνα του. Τα σκορπούν στη θάλασσα και λέγουν: «Αϊ Νικόλα μου, και πάψε την οργή σου!»

    Μία «σύγχρονη» ναυτική παράδοση για τον Αϊ Νικόλα τον Κυβερνήτη απ’τη θαλασσινή Μάνη:
    «Τα καράβια και τα καϊκια, στα παλιά χρόνια, ταξίδευαν χωρίς
    τιμόνι (μόνο σε γαληνεμένη θάλασσα). Τη συγκοινωνία από το Διακόφτι στα Βάτικα, απέναντι, την έκανε ένας περάτης, άγνωστος, που δεν ήταν ντόπιος. Κάθε φορά όμως που σηκωνόταν τρικυμία (πολύ συχνά), το καράβι, χωρίς τιμόνι, τσακιζόταν στους βράχους και οι άνθρωποι πνίγονταν. Ο περάτης όμως δεν πάθαινε τίποτε και κάθε φορά παρουσιαζόταν με νέο καράβι. Ήταν δαίμονας που χαιρόταν για το κακό των ανθρώπων. Ώσπου κάποτε μπήκε επιβάτης και ένας γεράκος, με άσπρα μαλλιά και γένια. Κρατούσε και στο χέρι του ένα παράξενο ξύλο, που πλάταινε προς τα κάτω. Το καΐκι συνάντησε πάλι τρικυμία, οπότε ο γεράκος τρέχει και στερεώνει το ξύλο του στο πίσω μέρος, το κρατάει γερά (ήταν το πρώτο τιμόνι) και κυβέρνησε το πλοίο, ώστε να μην τσακιστεί στα βράχια. Οι άνθρωποι σώθηκαν, κι ο περάτης, από το κακό του εξαφανίστηκε. Την ίδια ώρα εξαφανίστηκε κι ο γεράκος, που ήταν ο άγιος Νικόλαος και νίκησε το δαίμονα, μαθαίνοντας και στους ναυτικούς το τιμόνι.»

    Τα δημώδη ονόματα του Δεκεμβρίου είναι:
    Δεκέ(μ)βρης ή Δεκέμηρης, Γιορτινός (λόγω των πολλών εορτών), Αϊ-Νικολιάτης, Χριστουγεννιάτης, Χριστουγεννάς, Χιονιάς, Ασπρομηνάς κλπ.

    Στη ζωή των Ελλήνων αγροτών τρεις είναι οι εμπειρίες που προεξάρχουν: το κρύο, το τέλος της σποράς, και η μείωση του φωτός.

    Το κρύο συνδέεται με τρεις κυρίως γιορτές στην αρχή του Δεκέμβρη: της Αγίας Βαρβάρας (4), του Αγίου Σάββα (5) και του Αγίου Νικολάου (6) –τα λεγόμενα Νικολοβάρβαρα. Οι παροιμίες λένε: «Βαρβάρα βαρβαρώνει (το κρύο), αϊ Σάββας σαβανώνει, αϊ Νικόλας παραχώνει», «Αγία Βαρβάρα γέννησε (το χιόνι), άη Σάββας το δέχτει κι άη Νικόλας έτρεξε να πάει να το δαφτίσει (το βάφτισε χιόνι)».

    Αλλά και για τη χρονική εγγύτητα των τριών εορτών λέγεται:
    «Αγια Βαρβάρα μίλησε και Σάββας αποκρίθει κι Αγιονικόλας έτρεξε να πάει να λειτουργήσει».

    Οι γεωργοί θέλουν να ευχαριστήσουν τα ζώα τους (βόδια, άλογα) για τη βοήθεια που τους προσέφεραν στη σπορά και γι’αυτό τα γιορτάζουν στις 18 Δεκεμβρίου, του Αγίου Μοδέστου (στο συναξάρι του αναφέρεται ότι ανέστησε πολλά ζώα). Οι ζευγάδες ράντιζαν με τον αγιασμό τα σπαρμένα χωράφια, έριχναν κόλλυβα στη γη και τάιζαν τα ζώα τους μ’αυτά, αλλά και με άρτο (ύψωμα).

    Ο Δεκέμβριος έχει τις μεγαλύτερες νύχτες. «Του Δεκέμβρη η μέρα, καλημέρα – καλησπέρα», λέει μια παροιμία. Ο Ήλιος έχει τώρα τη μεγαλύτερη απόκλιση νότια του ισημερινού, με αποτέλεσμα το βόρειο ημισφαίριο να φωτίζεται πολύ λιγότερο από το νότιο. Από τις 22 Δεκεμβρίου (μετά το χειμερινό ηλιοστάσιο), η απόκλιση αρχίζει να λιγοστεύει, οπότε στο βόρειο ημισφαίριο η μέρα μεγαλώνει. Με το Ιουλιανό ημερολόγιο, το χειμερινό ηλιοστάσιο έπεφτε το 19ο αιώνα στις 9 Δεκεμβρίου (Αγ. Άννας). Παρετυμολογώντας, λοιπόν, το όνομα του Αγίου Σπυρίδων (12) έλεγαν: «Απ’του αγίου Σπυρίδωνα μεγαλώνει η μέρα κατά ένα σπυρί». Και στις 19 παραμονή του Αγ. Ιγνατίου, που η αύξηση του φωτός ήταν πια σημαντική, έλεγαν: «αύριο είναι ο άγιος Αγνάντιος' αγναντεύει ο ήλιος προς το καλοκαίρι».

    Οι ευχές όλη τη διάρκεια του Δεκεμβρίου κυριαρχούν και καθορίζουν τόσο τις άφθονες εορτές του μήνα, όπως του Αγίου Ελευθερίου (15) και του Αγίου Διονυσίου (17) όσο και τα επικείμενα Χριστούγεννα (25), την πρώτη μέρα του Δωδεκαημέρου
    *, καθώς και τη διαβατήρια ώρα της μεταβάσεως στον καινούργιο χρόνο.

    *Θα ακολουθήσει ξεχωριστό ποστ για το Δωδεκαήμερο.


    Καλό Μήνα!



     

     

     

     

     

     


    votre commentaire
  • Les rôles parentaux dans les «aventures de Pinocchio» de Colodi.

     

    Conte merveilleux et conte fantastique:

    «Les aventures de Pinocchio» est un conte des fées, un conte merveilleux.

    Il se place d’emblée ouvertement sur le terrain animisme, de la toute puissance des pensées et des désirs de l’homme. La pensée de l’enfant est animiste. L’enfant projette une âme aux objets.

    Dans le conte une bûche ordinaire a une âme. Le conte merveilleux abandonne le terrain de la réalité, il épargne à ces auditeurs, à débattre les limites entre imagination et réalité. On a l'impression d’une «inquiétante étrangeté», puisque l'objet a une âme. Pour que naisse le sentiment de l’inquiétante étrangeté il est nécessaire qu’il y a débat, afin de juger si l’incroyable ne pouvait pas malgré tout, être réel. Ce sentiment surgit chaque fois ou les limites entre imagination et réalité s’effacent, ou quand ce que nous avions tenu pour fantastique s’offre à nous comme réel. Imaginez un homme assis sous un arbre, il sent soudan que le tronc commence à bouger avant de se transformer en immense serpent, en boas.

    Le conte s’analyse comme un rêve. Qui rêve? Le rêveur commun, anonyme, qui rêve chez le conteur et chez l’auditeur. Freud dit que les contes sont des fantasmes des nations entières.

    Le conte pose des questions sur la naissance, sur l’origine de la sexualité, sur la vie et la mort, sur la découverte de la différence des sexes et des générations, sur la relation entre le désir et son accomplissement. Il pose la question du temps, le passage de l‘enfance à l’âge adulte, la menace de la maladie et de la mort.

    La psychanalyse des contes de fées, selon Bettelheim, est simple: il commence par la résistance aux parents et la peur de grandir et finit quand le jeune s’est vraiment trouvé, quand il atteint l’indépendance psychologique et la maturité morale. Le conte n’a pour fonction que de propulser l’enfant vers un état d‘adulte et la maturité et lui interdit des joies considérées en général comme naïves et naturelles. Le conte représente un processus de passage, de transformation et de métamorphose et concerne sa fonction dans le processus psychique lui-même. Il représente un passage pédagogique ou un processus de transformation sociale et culturelle.

    La toute puissance du créateur

    L‘idée de la toute puissance, la pensée magique c'est un fantasme très archaïque de l’homme qui pose la question du pouvoir et de la manipulation.

    Winnikote nomme le sentiment d’omnipotence du bébé de créer l’objet le moment voulu. Il s’agit de l’«illusion anticipatrice», le bébé croit qui crée l’objet, c'est-à-dire le lait, quand il a faim. C’est bien évidement une illusion et la désillusion va suivre.

    L’art d’aujourd’hui semple à nous dire: «désirez! Nous ferons le reste»

    La technique contemporaine est mise en service de l’imaginaire humain. L’homme a l’impression qui maîtrise sa vie, qui contrôle ses créations avec l’évolution des sciences et des techniques (procréation génétique, pilule, clonage,….)

    L‘ œuvre est l’objet de l’imagination du créateur, de ses fantasmes qui sont liés à ses désirs infantiles, à ses désirs insatisfaits, à son narcissisme. L’œuvre est une projection des désirs et des angoisses du créateur. Le rêve de l’homme est de créer un être artificiel, parfait, comme il l’imagine, à l’image de dieu–père (dimiourgos: créateur).

    Pinocchio est en bois, son père est trop pauvre pour le nourrir et normalement il n’a pas à le faire. Mais quelle surprise, Pinocchio a un excellent appétit. Les enfants de la société qui reflète le conte, sont obligés de travailler pour survivre. Pinocchio aussi est conçu pour travailler et pour faire vivre son vieux père.

    «….un pantin merveilleux qui saurait danser, tirer des armes et faire des sauts périlleux…..Avec mon pantin je vais faire le tour du monde pour gagner mon pain et un verre de vin».

    Il y a un renversement des rôles, l’enfant prend en charge ses parents quand ces derniers vont devenir impuissants, ou vieux. On observe ce phénomène surtout aux cultures méditerranéennes. Les parents se sacrifient pour leurs enfants, pour leur éducation et les enfants à leur tour, doivent se sacrifier pour leurs parents. Le devoir des enfants est de satisfaire les parents et d’être source d’un inépuisable bonheur.

    Dans le film de Commencini, la fée bleue dit à Pinocchio:«j’espère que tu fera le bonheur de ton père; il a tant désiré un enfant.»

    Dans le film «intelligence artificielle» David est une création immortelle, répondant au désir humain de vaincre la mort, l'espoir d’éternité. Il est conçu pour pouvoir aimer et se faire aimer. Le désir de l’homme est de reconstituer le corps humain après la mort, puisque l’esprit est immortel.

    En même temps, la peur, de la mort et des pulsions destructrices, est projetée dans l’œuvre. L’homme meurt, mais les robots, les créatures de son esprit survivent.

    Créer pour être immortel, laisser des traces malgré son destin qui est la mort, vivre dans la mémoire des survivants. S’inscrire dans la procréation, la filiation. Et bien sûr, avant l’enfant réel existe l’enfant imaginaire. L’enfant est un objet, censé de répondre à tous nos manques. Cet enfant devra être celui de la réussite sociale, parentale. Mais l’enfant est familier et en même temps étranger. Il vient de nous et d’ailleurs. C’est dans cet écart entre l’enfant imaginaire et réel que l’enfant va se constituer.

    L’homme a le fantasme d’enfanter; créateur comme le Dieu–père.

    Au début du récit la question de la paternité qui est ambivalente, se pose.

    A l’époque, un homme ne pouvait pas être sûr et certain qui est le père de l’enfant. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.

    Maître Antoine que «tout le monde appelle le Père», on se demande pourquoi, vit dans une solitude absolue «…..il n‘ y a pas d‘ âme qui vive ici.»

    La Cerise ne peut pas créer Pinocchio pour une simple raison: il ne reconnaît pas son âme, son existence. Il ne va pas prendre la responsabilité envers cette âme parce que il ne croit pas. Il préfère de croire qui est fou, qui entend des voix, bref, qu’il a des hallucinations. Le résultat est la peur de la paternité et sa fuite. Il se débarrasse de la bûche et pas sans dégâts puisqu’il se bagarre à cause de la bûche qui cherche un père. Il se dispute à cause de cette paternité ambivalente.

    Il me paraît intéressante cette dichotomie: d’un côté l’artisan qui fabrique sans distribuer l’âme à ses objets. Il ne la voit pas, même si les objets lui parlent, lui ne veut pas entendre. L’homme a du mal à accepter l’âme de la matière, je dirai plutôt qu’il lui projette une. Il croit que la mort vient séparer le corps de l’âme et que cette dernière demeure libre. Mais la bûche est un morceau d’un tronc d’arbre; cet arbre est vivant, interactif à son environnement, sensible aux changements des saisons et du temps qui inscrit à son tronc les années qui passent. Qui pourrait dire que le végétal et l’animal n’ont pas une âme? Car l’arbre est privé de la parole humaine et les animaux aussi.

    Dans le film de Commencini, maître Antoine, au début, a un sentiment de curiosité envers la créature de Gepetto, ensuite il a honte des gens qui vont croire que Pinocchio est son fils. Il a peur de l’avis des autres, parce que Pinocchio, il faut dire qu’il est différent des autres enfants.

    Gepetto pose la question dans son désir de création. Lorsque on est créateur, est– on pour autant père? Comment devenir un père en étant que créateur?

    Je dirais que personne ne naît parent, certains le deviennent, certains ne le peuvent.

    Quand naît un parent, c’est toujours dans la douleur, les questions, qui suis–je, dans quel but je suis ici, je serai un bon père ou une bonne mère?

    Le rôle primordial du père dans la famille est d‘ inscrire l’enfant dans la généalogie, de lui donner un nom et une place dans la filiation. Gepetto répond à ce besoin. Dès le début de la fabrication, il nomme son fils et lui donne un nom qui est censé de porter bonheur.

    Il s’agit du nom d’une famille toute entière, Pinocchio appartient à cette famille. On retrouve la coutume des sociétés ou l’enfant prend le nom des parents, ou des grands–parents, dans une répétition des noms. Je vais revenir plus tard à la signification du nom de Pinocchio.

    J’aimerais rester encore un peu à la fabrication de la marionnette. L’écrivain décrit avec précision le schéma corporel. Quand Gepetto fabrique les yeux de Pinocchio, ce dernier manifeste une âme. On dit que les yeux reflètent l’âme humaine et on fait très attention au regard d’une marionnette, quand on la fabrique. Et ça parce que son regard est très important pour sa vie et son expression. Les yeux du pantin fixent Gepetto qui se sent mal à l’aise sous ce regard intrusif.

    Après, il fait le nez qui s’allonge tout seul, (symbole phallique), malgré son intention.

    La matière prend le dessous, chose courante dans la création d’une œuvre plastique; comme si la matière gardait une autonomie. Comme si la matière inclue l’œuvre et l’artiste venait seulement pour la découvrir et la libérer.

    Après elle vient la fabrication de la bouche; il s’agit du stade oral qui se situe autours de la nourriture et bien évidement la parole. De la bouche de Pinocchio sort une grande langue. Il se moque de son créateur, il manque du respect à son père.

    Gepetto a conscience de toutes les parties corporelles de sa marionnette, mais il oublie les oreilles. Acte manqué et Pinocchio n’«écoute» pas. Il ne fait qu’à sa tête. Son créateur demeure triste car sa créature lui échappe: elle est autonome et imprévisible. Pinocchio veut jouer et donne un coup de pied à son créateur. Il va être puni plus tard, ses jambes vont cramer.

    Afin de voir l’analogie avec l’enfant contemporain et montrer son esprit manipulateur, je vais citer Freud qui a écrit que l’enfant est un «pervers polymorphe». Jusqu'à l’âge de 6 ans l’enfant utilise l’autre comme un objet pour satisfaire ses désirs. Après la

    6ème année, il rentre en phase de latence, phase de refoulement des pulsions et du développement des sublimations, apprentissage, art, jusqu'à la puberté.

    Je reviens maintenant au choix du nom de Pinocchio qui associe l’œil–l’occhio – et le pin. C’est un nom qui évoque un regard inquiet, à la fois attentif et naïf, qui s’oriente dans toutes les directions. Pinocchio a du mal à s’orienter. Ce qui lui manque c’est la métaphore paternelle, celle qui vient orienter le désir, le cadrer, symboliser et aussi permettre une médiation. D’être aussi désorienté, le conduit au passage à l’acte. Son 1er acte est une fugue. Il est un fugueur et un menteur. Il a des symptômes de refus scolaire, refus devant le savoir, refus devant l’autorité paternelle. Il a des angoisses qui se traduisent par des maux de ventre.

    L’histoire évoque des cas qu’on retrouve en clinique infantile. Quelque chose ne s’est pas encore structurée.

    Lorsque Pinocchio s’en va la 1ère fois de la maison de son père, c’est un Pinocchio désorienté, livré aux pulsions, il est violant. Ce fameux grillon, Pinocchio le frappe, il le fait taire et le laisse pour mort. Le discours du grillon est moralisant, (symbolise le sur–moi) et énerve Pinocchio. Lui, il n’a pas envie d’étudier.

    «…..je préfère courir auprès les papillons et grimper aux arbres pour attraper les oiseaux dans leurs nids……». Peut–être pour attraper l’oiseau qui lui échappe de l’œuf, quand il veut le manger.

    «…..mon métier à moi, c’est celui de manger, de boire, de dormir, de m’amuser et de vivre comme un vagabond du matin au soir…….»

    Freud a décrit ce comportement enfantin qui consiste à écraser des petites bêtes et l’a appelé «pulsion d ‘ emprise». Il s’agit d’une pulsion dont le but est de dominer l’objet par la force. Cette pulsion n’a pas originellement pour but la souffrance d’autrui, mais simplement n’en tiendrait pas compte. Pulsion de mort, pulsion sadique, qui se manifeste avec la destruction de l‘objet.

    Pinocchio dit en permanence ce qu’ils disent beaucoup des enfants en période de latence «je n’ai pas pu résister, les autres m’ont entraîné».

    Dans ces péripéties, Pinocchio est attiré par ce qu’ils font les autres; quand il va au théâtre des marionnettes au lieu d’y aller à l’école, il fait comme ces marionnettes auxquelles il s’identifie: il ne peut résister au fait de devenir une marionnette comme les autres. Il a envie de coller au désir de l’autre. Et comment pourrait de se convaincre qu’il doit agir correctement, alors qu’il est si fortement tenté de céder aux tendances asociales de ses désirs. Pinocchio est gouverné par les forces du ça, basé sur le plaisir et il est asocial et irrationnel.

    Le gendarme qui attrape Pinocchio par son long nez, symbolise la loi, c’est une figure paternelle avec une fonction paternelle Cela nous rappelle le dicton Grec: on attrape par le nez l’oiseau qui est intelligent.

    Nous trouvons dans le texte une série de punitions reflétant la mode de l’éducation de l‘époque: «…….attraper par le nez, tirer les oreilles,…».

    Le père ou le maître tient des attitudes comme: «…..capable de le battre,…..véritable bourreau,….il va le mettre en pièces».

    L’histoire de Pinocchio est une histoire avec une structure familiale dramatique. L’abandon, le désespoir, la mort sont des moments forts en émotion. C’est l’histoire de la quête du père.

    Dans l’intelligence artificielle David cherche la mère et l’amour maternel. Peur d’une mauvaise mère qui va abandonner son fils dans la forêt, mais elle va lui laisser Tendy le nounours, un objet transitionnel auprès Winnikot, objet qui va aider l’enfant à supporter la séparation avec sa mère.

    Pinocchio va devenir un vrai petit garçon mais cela ne peut se produire qu’après qu’il aura retrouvé son père et le sauver. Les retrouvailles avec son père se passent dans le ventre du requin. L‘image du requin renvoie à des fantasmes de dévoration, attachée à l’image de la mère toute–puissante. La mère est symbolisée par le requin. Elle a avalé le père et le fils. Dans le ventre du requin, Pinocchio retrouve son père marqué par la castration. Gepetto pense qu’il va mourir, il ne désire plus rien, chose qui va produire une transformation chez Pinocchio. Le fils devient actif et prend en charge son père, il va le sauver. C'est Pinocchio qui désire à la place de son père.

    Il y a un déplacement. Gepetto qui était sculpteur se remet à sculpter.

    Pinocchio dort et fait un rêve.

    David va aller aussi aux sources des rêves, pour la première fois, un robot va rêver. C’est pour ça qu’ils sont uniques, différents. Dans son rêve, Pinocchio voit la fée qui lui donne un baiser, sa récompense, et comme dans un miracle la métamorphose va se produire. Il se réveille et tout étonné, il se retrouve enfin petit garçon. Sa 1ère démarche est d’aller se regarder dans la glace:«….Ensuite en allant se regarder dans la glace, il crut qu’il était un autre…» C’est le 2ème temps du stade de miroir. Il croit qu’il est un autre et c’est cette altérité qui lui donne son identité. Il y a une aliénation structurante qui se met en place. «….Il n’avait plus devant lui l’image familière de la marionnette de bois, mais celle vivante et subtile d’un bel enfant……».

    Donc, c’est une image idéale qui correspond à la mise en place d’un moi–idéal, un

    Idéal de toute puissance, un narcissique forgé sur le modèle du narcissisme infantile, identification à la mère investie de la toute puissance.

    Le stade du miroir correspond à une unification imaginaire, une unité corporelle.

    Pinocchio demanda à son père: «Et le vieux Pinocchio de bois où peut–il bien être?»

    Gepetto lui montre un pantin inanimé (situation des marionnettes quand on ne les manipule plus, elles sont sans âme, mortes). Pinocchio en se retournant, le regarda un peu, puis il dit avec une immense satisfaction: «…..Comme j'étais ridicule lorsque j'étais pantin». Il y a ici une chute d’une image dévalorisée, désinvestie. On voit l’effet d’un refoulement.

    Rôle maternel

    Les Fées:

    On les appelle aussi les bonnes marraines, les dames blanches, les Bienveillantes, les Bonnes et Franches Pucelles, les Fileuses de destin, (appelées Moïres dans la mythologie Grecque).

    Les fées ne grandissent jamais, ne vieillissent jamais, mais elles ne sont pas immortelles. Certaines sont de taille et d’apparence humaines. D’autres ont la taille, le corps et le visage d’un enfant entre 6 et 10 ans.

    Dans le conte de Pinocchio la fée apparaît comme un enfant et comme une femme.

    Dans «l’intelligence artificielle» la fée est une créature virtuelle, une image virtuelle, une statue qui va se casser en milles morceaux, quand David la prend dans ses bras. Dans une société évoluée, (technologie de pointe), la fée est une projection du désir.

    La fée est aimable, désirable, belle, c’est l’idéal féminin, symbole de l’anima dans la psychologie des profondeurs de Yung. Elle incarne tout à la fois la vierge, la sœur et la mère.

    Elle fait figure de l’ange gardien. En général, elles sont amorales, mais pas chez Colodi.

    La fée est souvent le deus ex machina, la bienveillante. Les fées veillent sur les foyers et les naissances d’êtres humains, mais également sur leurs décès. Elles sont aux sources de la vie et de la mort et aident les mortels à passer d’une dimension à l’autre.

    Les fées Blanches (il y a aussi les fées de la nuit) sont des divinités du passage du chaos à l’ordre, du non être à l’être. Elles incarnent la part féminine du Dieu– créateur–Gaia (la terre) par rapport à Ouranos (le ciel). A mi–chemin entre la terre et le ciel, elles interviennent en faveur des hommes. Elles s’amusent à remettre dans le droit chemin les voyageurs perdus. Elles ont des pouvoirs magiques.

    La fée est un symbole de notre évolution, de notre réalisation personnelle, de notre vœu. Elle est agissante et efficace.

    La Fée bleue est la mère spirituelle de Pinocchio. Elle l’aide à devenir lui–même.

    La quête du père, dans les aventures de Pinocchio ne peut se faire sans l’intervention d’une autre dimension maternelle, d’un autre pôle de la structure familiale (père–mère–enfant). Cet autre pôle c’est la fée bleue qui est un élément décisif et qui va aider Pinocchio à se transformer à un petit garçon, fils de son père.

    Dans le film «intelligence artificielle» la fée bleue pourra faire David un vrai petit garçon puisque le méca va faire la fée bleue une vraie femme. L’homme reconnaît en lui un côté mécanique, programmé, qui se répète, (il crée une machine de sexe qui va combler la femme, l’aider à s’épanouir, la rendre heureuse et capable d’assumer son rôle).

    Pinocchio a besoin de trouver et de réaliser une mère, car cette dernière n‘apparaît pas dans le discours du père.

    Lacan disait que cette réalisation de la mère se fait par phases: d’abord la mère est présente–absente. Ensuite elle est réalisée comme « toute–puissante» Enfin elle est la mère désirante. Quelque chose se déplace, se construit avec la médiation du père. L‘enfant aura à construire le désir de la mère, ici symbolisée par la fée bleue.

    Le désir de la fée qui va porter Pinocchio, apparaît à l’occasion d’un épisode ou P. manque de mourir: « …..Ces balancements lui causaient des douleurs atroces et le nœud coulant se resserrant sur sa gorge, lui coupait de plus en plus la respiration. Alors ses yeux se voilèrent peu à peu et il sentit que sa mort était proche; mais il espérait encore qu’une âme charitable arrivera d’un moment à l’autre pour lui porter secours…»

    «Oh papa si tu étais ici!» L'appel du père, mais qui répond? Ce n’est pas le père, c’est en effet la fée bleue qui apparaît à ce moment là, sous les traits d’un bel enfant aux cheveux bleus qui fort émue de voir ce malheureux enfant en si mauvaise posture, le sauve de la pendaison. Le désir de la fée bleue se manifeste d ‘abord à l’égard de Pinocchio par une compassion. Elle est inquiète pour lui et déploie tous ses moyens pour le sauver de la mort. Elle va avoir envie de le transformer en un vrai petit garçon. Pinocchio va prendre de plus en plus de l’importance aux yeux de la fée. Lui aussi a envie de répondre au vœu de sa mère de substitution. Mais il est toujours empêché.

    Les enfants ont besoin d’être portés par l’imaginaire et la parole de l’autre. Selon Lacan: «l’homme n’a pas de réel à son désir; ce désir est d’ailleurs le désir d’un autre», ou «le désir du sujet est d’être objet du désir de l’autre».

    La fée bleue lit dans la pensée de Pinocchio. Elle symbolise la mère toute puissante. Pinocchio craindra ce que cette puissance pourra penser de ses actes. Il va avoir des attitudes de réparation auprès d’elle: «on va voir si tu es assez bonne, si tu vas me pardonner».

    La réparation est un mécanisme décrit par Mélanie Klein. Il s’agit de réparation des effets sur l’objet d’amour de ses fantasmes destructeurs et de son sadisme.

    A la fin de l’histoire, quand Pinocchio. va devenir un vrai petit garçon, la fée aura perdu son caractère tout–puissant.

    Dans le film «intelligence artificielle» la toute–puissance de la fée souvent se met en question. La fée est impuissante devant la mort.

    Pinocchio de son côté vois sa tombe. L’esprit évolué va utiliser toutes les connaissances de l’histoire de l’espèce humaine, pour reconstituer ce monde de rêve, pour animer et faire vivre l’imaginaire de l’homme. Cet esprit évolué va venir après la disparition de l’homme qui lui est incapable de dépasser ses pulsions de mort et de survivre.

    Les chercheurs ont trouvé, en Pinocchio, de nombreuses sources, de nombreux exemples représentatifs des différents aspects de l’histoire du XIX ème siècle, des dizaines de sens psychologiques ou psychanalytiques, et bien entendu, de nombreuses stratifications de symboles et d’histoires séparées entre elles, ou pouvant s’amalgamer en une unité divine. Il est juste que chacun voit ou apprécie un livre selon son propre miroir de connaissances, de sensibilité, de capacité à en tirer profit et de résonance mnémonique.

    Pinocchio est le livre de la solitude dans l’absolu. Le pantin, qui est et restera toujours un enfant dans toutes ses aventures et toutes ses pensées, est presque toujours seul. A côté de la solitude, qui est la condition des personnes les plus sensibles, il faut placer la peur continuelle, dont il est la proie, sauf quand intervient en lui l’éloignement du monde, grâce au recours à un simple jeu. La solitude de Pinocchio est aérienne, légère, mais pleine d’incertitude de la vie, bref pleine du bouleversement et de sublimation de l’habituelle «dimension de la solitude» qui se reforme continuellement en nous. Cette idée pourrait être admise comme interprétation fondamentale des voyages de Pinocchio, qu’on pourrait comparer à un épi de maïs aux innombrables grains. Et chaque grain, chaque aventure, peut présenter pour le lecteur des semences diverses de plaisir et d’interprétation.

    Ecrit par Eleni Papagéorgiou dans le cadre du séminaire: «La marionnette: un autre acteur, un autre corps, pour un autre théâtre», Maitrise de l'nstitut d’études théâtrales de Paris III, 2003.         

    Bibliographie

    1. «Psychanalyse des contes de fées» de Bruno Bettelheim, édition: Robert Laffont, 1976.

       

    2. «Fées et elfes», d’Edouard Brasey, édition Pygmalion, 1999.

       

    3. «Le bébé imaginaire» de Patrick Ben Soussan, édition:Erès, 1999.

       

    4. «Pinocchio en mal de mère. Construction du désir de la mère et métaphore paternelle» de Pascal Le Maléfan, article dans une revue, (page 65), intitulé: «La marionnette et les âges de la vie», compte rendu du VIII ème colloque international, Paris 1998, dans le XIème festival mondial des théâtres de marionnette, organisé par «marionnette et thérapie».

       

    5. «Contes et divans» de René Kaës et coll., édition: Dunod, 1966, Paris.

       

    6. «Les aventures de Pinocchio; Histoire d’un pantin» de Collodi, écrit le 1881-1883, éditions: mille et une nuits, 1997.

    Intelligence artificielle de Steven Spielberg

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


    votre commentaire
  •                            Par Eleni Papageorgiou dans Accueil le 7 Octobre 2011 à 01:06

                                         
                                    ART-THERAPIE 
     
    On pourrait aussi l'appeler psychothérapie par l'art, ou psychothérapie médiatisée ou encore psychothérapie expressive orientée. On entend l'art comme mode d'expression qui se met au service du soin à travers la relation psychothérapeutique. L'art devient un moyen d'expression et de communication privilégié. L'art joue le rôle de médiateur, il est le moteur de la communication. L'art thérapeute est un artiste formé à la relation avec les publics en difficulté. Il doit faire un travail sur soi, comme chaque psychothérapeute. Il propose la création afin de permettre au sujet de se réparer. Donc, le but recherché n'est pas l'esthétique, comme dans un atelier purement artistique. Chaque atelier va poser des différents objectifs, par rapport à la problématique de son public. Sur le terrain psychiatrique, nous mettons en place des ateliers thérapeutiques dans les hôpitaux et on va travailler avec toutes les psychopathologies rencontrés. On distingue le travail psychopédagogique, où on apprend à dépasser sa difficulté psychique et sociale. On travaille par exemple, sur le mal être du sujet à vivre dans deux différentes cultures, à dépasser sa timidité, à se redynamiser. Nous visualisons toujours le potentiel des sujets. Les ateliers de l'art thérapie est un espace de liberté, où on peut transgresser l'interdit. Caché derrière le castelet avec une marionnette, ou derrière un masque et l'anonymat, nous pouvons dénoncer les abus, les maux que les interdits occasionnent. Le sujet dépasse plus facilement sa timidité quand il n'est pas confronté directement au regard frontal de l'autre. Le regard médusé de l'autre qui peut le pétrifier, l'enfermer sur lui même. Cette liberté d'expression suppose un cadre avec des règles et des limites qui ont une fonction protectrice et structurante. Il y a aussi les règles propres à toute activité artistique. Quand le jeu s'établit avec des règles, on peut espérer une réorganisation psychique heureuse. On prépare un espace contenant, afin que le sujet fragile puisse être en liberté, afin de retrouver son désir de création partagée et ainsi se purifier. « Katharsis » veut dire purgation, purification des passions, par le moyen de la représentation dramatique. Aristote dans sa politique nous parle des mélodies qui transportent l'âme hors d'elle même. La musique fonctionne comme un remède, une purification, un allégement, accompagnés de plaisir.  
    La marionnette permet de synthétiser tous les arts. Arts plastiques, arts de la scène, écriture, musique.
                              
                                   Historique 
     
    En Chine, (1558-1550 A.C.), les marionnettes (Yong, marionnettes en bois, de taille humaine), sont liées à la culte des morts. Elles étaient manipulées par un prêtre, elles présentaient un défunt, un ancêtre ou un dieu. A travers sa manipulation, le prêtre fait parler les esprits ou les dieux et cela constitue le rôle d'un chamane qui a une fonction d'exorciste. 
    En Grèce antique, les marionnettes, les masques la danses et le drame sont liés aux rituels de Dionysos. Les fêtes qui se déroulent au début du printemps s'appellent «Anthestiria» et comportent le déguisement, la mascarade, l'ivresse (le vin est utilisé comme médicament), le jeu, le théâtre, la marionnette, le masque, la transe et le délire extatique. C'est le dieu qui donne la manie, la possession par l'autre, mais aussi la guérison, la purification à travers l'extase. Ces rituels permettent au sujet de devenir un "autre", admis et accepté par le groupe social dans ce cadre précis. Je pense au carnaval, où le sujet peut incarner des rôles interdits dans la vie quotidienne. Dans ce cadre, nous avons le droit de transgresser l'interdit. Malheureusement dans beaucoup de sociétés, nous avons perdu ces rituels "thérapeutiques". 
    Il s'agit de la thérapie par le double. Le double qui fait partie de nous mêmes et qui souvent nous échappe. L'idée de la mort a été rendu supportable par la fabrication d'un double, dont le rôle est d'assurer une autre vie après la mort.
    Narcisse se métamorphose en fleur blanche, il y a là l'idée de l'éternel renouvellement, où la mort est vaincue par une nouvelle création. La marionnette matérialise le miracle de la résurrection, elle passe de l'immobilité à l'animation, de la mort à la vie. 
    On retrouve cette idée de la maîtrise de la mort à la cérémonie «Niobo» au Zaïre, il s'agit d'une marionnette géante, le double du défunt, portée par les enfants du mort. C'est elle qui conduit le cortège, elle blague, refuge d'avancer, simule le retour à la maison, elle ne veut pas se laisser enterrer... Il y a une dédramatisation de la réalité de la mort et dérision. 
    Sur le cérémonial des indiens Hopis, dès la fabrication de la marionnette, le sculpteur et ses compagnons désignent une femme, considérée comme la gardienne de la marionnette ou la mère rituelle. Elle simule l'accouchement, elle lave ses cheveux, et la nomme. La marionnette est considérée comme un enfant, un nouveau né. 
    Otto Ranc site que la déesse de l'amour se transforme en déesse de la mort. La mort est vaincue par une nouvelle création. Cela nous ramène à l'image idéale de la mère, un renouvellement éternel et l'idée de l'immortalité humaine, tant désirée. 
    La marionnette est utilisée pour la magie noir et la magie blanche. Au théâtre, nous pouvons incarner le mal, jouer avec lui, on fait comme si...Faire un diable permet de vivre, de mieux mesurer les dimensions de ces abîmes, d'où la peur peut venir. Le sujet en donnant forme à ses peurs, il arrive mieux à les combattre, à les gérer. Jouer à la guerre, ne permet ni de gagner, ni de perdre, mais de représenter le monde, se confronter à la vie et grandir. 
    En Afrique, les marionnettes symbolisent l'union des vivants et des morts, elles communiquent la volonté des esprits des ancêtres, à travers la manipulation des «vieux» (il s'agit des marionnettes fétiches, réservées aux initiés, c'est intérdit aux femmes et aux enfants de les voir). 
    En Sibérie, en Birmanie, les chamanes utilisent les marionnettes pour guérir. 
    En Inde, en XI siècle, avant J.C., apparaît à côté des thèmes religieux un personnage populaire «Vidouchaka», un brahmane, nain et bossu, chauve, bête et rusé, moqueur et grossier, qui bat tout le monde. Après la naissance du Christ, ce personnage voyage et se transforme en Guignol (France), en Polichinelle (Italie), Punch (Angleterre), Karagioz (Turquie et Grèce). Le Guignol apparaît fin XVII siècle, et sert initialement à informer (infos politiques et sociales), et s'adresse à un public quasi analphabète. Napoléon III va censurer ces représentations. Je vais finir avec les Guignols des infos contemporaines, (caricatures des hommes politiques) et leur fonction qui est de critiquer la vie politique de la société actuelle.  
     
                           ENFANTS 
     
    Les enfants sont à un âge susceptible aux changements, car rien n'est encore fixé. Ils comprennent directement le langage symbolique, (ex: les contes), sans retour intellectuel. Nous pouvons alors intervenir plus facilement et changer leurs croyances. Les enfants apprennent plus vite, ils sont plus près au jeu. Le jeu représenté devant l'autre, qui est attentif et bien veillant, permet d'exprimer les affects mais aussi les réintégrer. Grâce au jeu, l'enfant peut résoudre des conflits psychiques, il peut se décentrer (âge égocentrique, avec une vision du monde subjective), il peut voir qu'ils existent d'autres points de vue. Il assimile et s'accommode pour s'adapter à la réalité.
    Les enfants aujourd'hui sont obligés de rester assis sur une chaise pendant des heures à l'école. L'éducation a presque éliminé le jeu, qui a mes yeux est trop important pour le développement de l'enfant. Cette continuité naturelle est nettement arrêtée. Je vous rappelle que l'homme joue pendant toute sa vie. Nous nous demandons alors pourquoi on a souvent à faire avec des enfants hyperactifs qui ne tiennent pas sur place.  
    Dans nos ateliers nous créons l'espace pour instaurer le ludique, dans un cadre réfléchi, chaque fois, par rapport à la problématique du groupe. En plus, le jeu proposé est structuré lui même par des règles propres à la médiation. Si on veut travailler plus sur le corps, nous proposons le masque ou la danse. 
    Nous réactivons l'imagination des enfants, afin d'optimiser leur narcissisme, le sentiment qu'ils ont pour la perfection. 
    Le jeu collectif restaure l'estime de soi et rétablit la confiance réciproque. Il construit le « je » narcissique avant le « je » social. Le groupe va soutenir le sujet, et va lui réactiver des images parentaux, des places de chacun dans la famille. Des situations traumatiques vont se rejouer dans un nouveau contexte. La souffrance exprimée par le jeu et l'humour fait rire et dédramatise. 
    Le castelet est un espace protégé qui met à l'abri tout le corps du manipulateur, en ne laissant voir que sa main gantée. Tirer le rideau c'est cacher pour préserver le secret. Le secret est source d'angoisse et son aveu libère l'âme. 
    L'art, en tant qu'expression et communication est chargé d'un message, d'un sens. Et c'est le travail de l'art thérapeute de l'entendre.  

    1 commentaire
  • Rites mortuaires-rites de fécondité et marionnette, intervention dans le cadre du colloque de "Marionnette et Thérapie", à Charleville Mézières, le 17 septembre 2011

     Périple aux racines de la marionnette, afin d’étudier ses liens avec la mort et la re-naissance. Croyances, rituels et mythologies.  

    Je vais vous parler des mythes des origines qui nous rappellent les racines sacrées des marionnettes, ancrées dans la mémoire humaine.

    LE RITUEL ET SON UTILITE POUR UN ATELIER THERAPEUTIQUE

    L'idée de la mort et de «non être» nous est insupportable. C'est pour cela que l'homme met en place des rituels, afin d'accompagner l'âme du défunt. La communauté donne ses réponses au plus grand mystère, celui de la mort et de la vie. Le corps meurt et son double, son âme continue une autre vie. Qu'on ne voit pas. Qu'on ne connaît pas. La mort est «Adès»: celui qu'on ne voit pas. On peut imaginer que la mort est une porte qui en s'ouvrant, donne vue à un espace onirique, fantasmatique, imaginaire et créatif.

    Mis en terre, brûlé ou livré aux vautours sacrés, le corps du défunt est l'objet de toutes les attentions, afin de mieux respecter l'âme. L'homme, très tôt, a des rites pour ses morts, il prend soin et les enterre. Avec le paléolithique, nous avons des rituels complexes, des ornements et une grande valorisation des défunts. Les rites de mort sont conçus comme un passage des expressions diverses et des croyances en une vie post-mortem. Le rituel est un moment théâtralisé et valorisé, avec une mise en scène de la situation, dans un lieu sacré et une conduite à tenir. Plusieurs objets sacrés et symboles sont utilisés dans une organisation qui permet d'établir un lien avec l'invisible et l'âme.

    Le rituel signale et confirme devant la communauté un passage, un changement sur l'état du sujet. Il est lié à l'alternance de la mort et de la vie à travers les saisons, (hiver-printemps); son caractéristique est la répétition.

    Dans une thérapie groupale, le sujet peut renaitre aussi, mettre de l'organisation dans le chaos, tenter de recréer une nouvelle identité de lui-même, en unissant ses morceaux dispersés. Au début, le sujet est dans un groupe qui le rassure, le soutient et le berce. Le rituel peut offrir à une personne fragile un réconfort qui se reconstitue dans un temps thérapeutique. Il protège de l'angoisse de la séparation et de la mort et il promet une renaissance. A mes yeux, la mise en place du rituel est une étape importante dans les ateliers, parce qu'il puise sa force de nos traditions familiales, de nos ancêtres et de notre histoire. Le rituel unit le groupe, il est plutôt du côté de la création et de la vie et non de la destruction et de la mort.

    Marionnettes et masques, danse et musique sont ancrés dans les rites sacrés de la mort et de la vie. Dans un trajet initiatique aux labyrinthes, des épreuves préparés par les prêtres, le sujet, un vrai héros, arrive vers la lumière, vainqueur de la peur et peut laisser derrière lui les monstres de la nuit. Il a fait l'expérience symbolique de la mort et du recommencement. Voilà la force des telles médiations: nous faire plonger dans le chaos et recréer du nouveau tout en se purifiant. L'accès au monde de l'inconscient peut être dangereux, comme une descente dans l'autre monde ou l'entrée du labyrinthe. Suivons le fil d'Ariane pour en sortir.

    LES MARIONNETTES DANS LES RITUELS TRES ANCIENS

    Dès le XIXe siècle avant J.C., en Égypte, les prêtres animaient les statues sacrées à l'aide de cordes, dans les temples, lors de fêtes. La première marionnette trouvée est une Égyptienne, datée de l'époque du Nouvel Empire, (1.580-1.085 av J.C.). Elle représente un chacal-Anubis, le dieux des morts. On reconnaît à sa tête de chien noir le dieu de la mort Anubis, qui remonte probablement aux sources de la civilisation Égyptienne, puisque sa fête est mentionnée dès 3.000 av J.-C. Il est devenu patron des embaumeurs en inventant la momification. Anubis, maitre de la «thanato-praxie», il accompagnait le défunt, protégeait sa dépouille de la corruption et donc de la mort définitive.

    Pendant les embaumements, le prêtre revêtait le masque d'Anubis et rejouait la scène mythologique de momification d'Osiris. Seth, jaloux de son frère Osiris, le tue et disperse ses morceaux à toute l'Égypte. Isis, femme et sœur d'Osiris, retrouve 13 morceaux de son corps sauf un, son organe sexuel, tombé dans la mer et dévoré par les poissons . Elle le reconstitue et lui redonne la vie.

    Ces mystères ont une origine préhellénique, ils plongent leurs racines chthoniens, venus des Phéniciens, de Syrie, de Paléstine, d'Israël. Nous parlons des cultes très anciens de 5.000-6.000 av J.C. qui vient en Egypte du Sahara oriental.

    En Égypte, le rituel théâtral a un contenu qui symbolise la création du monde. Il s'agit de la répétition d'un acte primordiale paradigmatique: la transformation du chaos en cosmos par l'acte divine de la création. Il projette l'homme à l'époque mythique du commencement. C'est une répétition et par conséquent une ré-actualisation de «ce temps-là». Tout rituel a un modèle divin et un archétype: C'est l'union avec dieu qui assure la fécondité terrestre et la renaissance.

    Toute nouvelle année est une reprise du temps à son commencement, un passage du chaos à la cosmogonie, du morcellement à l'unité, de la mort à la vie.

    Hérodote, le grand historien Grec relate la fête de Dionysos, qui est aussi Osiris en Égypte: des femmes y manipulent des immenses statuettes, dotées d'articulations qui permettent la manipulation du phallus. A Chypre, des telles statuettes ont été retrouvées, (elles se trouvent actuellement au temple de Saint Irène). Notons ici l'origine sacré de l'organe sexuel (Αιδειο), qui sacralisé et respecté, avait une valeur symbolique pour les initiés, (Αιδώς).

    Tiressias le devin, déclare qu'il y a deux lois du commencement pour l'homme: la déesse Déméter, la terre, la nourriture et son égale Dionysos. Dionysos a amené aux hommes le jus de raisin apaisant les agonies, donnant le sommeil, l'oubli de maux de la vie quotidienne, le médicament pour les soucis. Le vin a une identité surnaturelle; il a plu une goutte du sang des dieux sur la terre, cela a donné une petite vigne. C'est le «sang de la terre». Au début le vin pure amène à la folie ou même à la mort. C'est une drogue qui amène son consommateur à l'animalité, mais il peut être aussi un remède.

    Dionysos, enfant adultérin de Zeus, a subi le même sort tragique qu'Osiris. Héra, la femme légitime de Zeus, folle de jalousie, ordonne aux Titans, de l'anéantir. Par ruse, ils glissent entre les jouets de l'enfant un miroir, c'est de telle facon qu'ils le morcellent. Ensuite, ils bouillient ses morceaux et les mangent. Athéna sauve son coeur, le donne à Zeus qui le reconstitue en plâtre blanc et lui redonne la vie. Zeus frappe les Titans avec ses tonnerres et de leurs cendres il crée l'âme humaine. L'élément divin passe de Dionysos chez les Titans, puisqu'ils ont mangé sa chair et des Titans dans l'homme. D'où la nature divine de l'homme. Mais l'homme a une nature double, c'est également un pêcheur. On retrouve la "théo-phagie" dans l'eucharistie du corps du Christ. Dans ces rites on retrouve l'expérience de communier avec le divin.

    Durant les fêtes dionysiaques, les bacchantes possédées par le dieu, dansent en manipulant des serpents, dans une sorte de folie valorisée par l'expérience religieuse. Le dieu rentre en elles par une possession provoquant une forme d'animalité chez les participantes. L'état de la manie, on le voit, peut être à la fois destructeur et créateur. 

    Le culte de Dionysos est attesté sur toute la Grèce et attire toutes les couches sociales. L'ivresse, l'érotisme, la fertilité universelle, l'inoubliable expérience provoquée par l'arrivée des morts, la mania, l'immersion dans l'inconscient animal, ou encore l'extase surgissent d'une même source: la présence du dieu, son apparition. C'est le dieu qui va et vient, qui monte et descend. Il fait la jonction entre les deux mondes, le monde des vivants et des morts. Il est présent et soudain il disparaît, cela reflète l'apparition de la vie et de la mort, de leur alternance et de leur unité.

    Dans ce culte il s'agit d'une tentative de libérer la vie de l'instinct présent chez l'homme en l'éloignant des conventions et des habitudes sociales. 

    Dionysos est le dieu nourricier qui vit dans une atmosphère d'insouciance et d'absence de travail. Il est le dieu de la bonne humeur, la joie de vivre. Mais dieu mortel, persécuté,assassiné par les Titans, il est aussi l'étranger à la cité. Son culte dérange les valeurs de l'époque. Ses extases signifient la liberté et la spontanéité transgressant les interdits classiques de la société et de la morale, ce qui explique en partie l'adhésion massive des femmes à son culte.

    Car Dionysos est le dieux des femmes. Les «bacchantes» entendent la flûte et sa musique brutale et quittent leur maison et leur cadre sociale. Il leur donne la liberté de s'identifier à l'instinct animal, hors du modèle masculin. Elles se libèrent ainsi de la réalité contraignante et cherchent à devenir protagonistes de leur propre vie.

    Dionysos permet le passage du rituel à l'art. Il est protecteur des jeux dramatiques. C'est un de trois dieux masqués. Le dévoilement du masque de Dionysos rendait fou celui qui le regardait. Dionysos l'étranger, porte le masque qui cache l'identité de l'autre, l'altérité qui caractérise l'homme. Avec Dionysos nous rencontrons l'intrusion soudaine de ce qui nous dépasse, au delà de l'existence quotidienne, du cours normal des choses, de nous mêmes: le déguisement, l'ivresse, la transe, le délire extatique à travers le jeu, le théâtre, le masque et la marionnette. Dionysos apprend à faire l'expérience d'une évasion vers une déroutante étrangeté. C'est le dieu qui donne la manie, la possession par l'autre, mais aussi celui qui apporte la guérison, la purification à travers l'extase. 

    En étudiant Dionysos nous comprenons mieux la nature rebelle et étrange des marionnettes (Vidouchaka en Inde, Polichinelle en Italie, Punch en Angleterre, Karagiozis, figure d'ombre en Grèce et en Turquie, Guignol en France). Les marionnettes se situent en dehors de la loi humaine ordinaire, bravant même celle de la mort. Libres de leurs mouvements, elles ont leur propre centre de gravité. Contre les conventions, elles ont un esprit libre, critique et «anarchique». Ce sont des résistantes, celles qui remettent en question, celles qui peuvent purifier, justement grâce à cette nature. Elles permettent la présence de l'autre en soi, ce qui nous intéresse dans un travail sur le double.

     Hétéron: le différent.

    On verra alors comment le monde de Dionysos se distancie du monde Apollonien: le barbare s'oppose au classique; le spontané au réflechi; l'inconscient au conscient; l'inconscient groupale à la conscience individuelle. L'élément Apollonien, est un symbole solaire de l'harmonie et de l'équilibre et sa lumière couvre les forces obscures de la vie. On trouve Apollon avec son art c'est lui qui amène la sagesse, la culture. Pourtant les deux éléments, le dionysiaque et l'Apollonien ne font qu'une seule unité organique, celle des opposés. Leur opposition n'amène pas à la division, mais à la naissance de la tragédie, avec la rencontre des deux éléments, du dionysiaque avec l'inspiration, l'ivresse de la musique et de la danse et l'Apollonien avec la sculpture, les formes géométriques, la loi.

    Le monde de Dionysos est un monde d'une existence massive et groupale, le monde d'Apollon est celui de l'existence individuelle et personnelle, de la naissance du sujet. 

    Il nous faut tous les deux éléments dans un atelier thérapeutique, la liberté d'être «autre» et un cadre structuré, sécurisant. Pouvoir exprimer ses deux natures afin d'arriver à l'unité, celle des contraires. Cela me fait penser à la marionnette, figure dionysiaque et au castelet, structure et cadre pour qu'elle puisse s'exprimer à toute liberté.

    Quelques mots maintenant sur une autre dualité, pour mieux comprendre cette dualité des opposés, celle d'Eros et de Thanatos : Eros symbolise l'instinct de la auto-conservation qui nous lie avec l'union, la civilisation. En opposition, la Mort propose le morcellement et la destruction, le chaos. Il s'agit d'un retour dans une situation inorganique, au point zéro des tensions, dans le lieu appelé Nirvana, qui est en fait le siège de la pulsion de mort. Dans l'instinct de mort l'auto-agressivité prédomine sur l'agressivité, force de vie et liée à la vie. Tous les psychopathologies ont à avoir avec l'instinct de mort. (Dépression, agonie, psychose, toxicomanies, perturbations narcissiques). Dans les ateliers thérapeutiques, l'objectif soignant la transformation du chaos en formes reconnaissables, dans un cadre qui donne du sens. Le but n'est pas d'annuler l'agressivité et déclarer indésirable l'instinct de mort mais d'amener l'énergie psychique à être créative et se mettre au service des facteurs créatifs humanisants. L'âme humaine ou encore l'humanité peut se voir à travers l'art et l'initiation.  

     

     DEMETER, UNE DRAMATOURGIE DIVINE

    Les mystères d'Eleusis, sont consacrés à Déméter, la déesse de la mère terre et de l'agriculture. Adès, dieu des enfers enlève sa fille Pérséphone, pour en faire sa femme. Alors Déméter dessèche la terre, le monde souffre de la famine, elle ne fait que chercher sa fille partout et refuge de travailler. Toutes les plantes meurent. Déguisée en mendiante elle arrive à Eleusis où elle est accueillie. Elle dévoile sa vraie identité et elle initie 4 personnes aux mystères de son culte et à la maitrise de l'agriculture. Tous ses initiés gardaient le secret de la religion et croyaient fermement que grâce à leur initiation ils connaîtraient la vie éternelle. Les rituels d'Eleusis sont interpréter comme une figure du changement des saisons. Le mythe de «koré», la jeune fille, traduit le rythme des saisons, l'attente du printemps et le désir d'une terre féconde. 

    L'initiation aux petits mystères: les prêtres rejouaient le mythe de Pérséphone.

    Initiation aux «Grands mystères»: Les cérémonies de l'initiation se déroulaient en 3 temps: 

    • paroles et enseignements secrets,

    • processions et jeux dramatiques,

    • et présentation d'objets sacrés devant un public

    Les initiés devaient passer la nuit de l'initiation en affrontant de terribles épreuves. Ils étaient vêtus de peau de faon et devaient déambuler, dans de dédales, dans l'obscurité la plus totale, à l'écoute des gémissements angoissants. Dans les labyrinthes avaient des visions apocalyptiques, des artifices étaient mises en place par les prêtres. Un prêtre mettait en suite en action une fumigation, qui avait pour effet de faire apparaître des formes fantasmagoriques, mi hommes, mi démons. Ils arrivaient à télésterion où 3.000 personnes pouvaient prendre place. Ils découvraient assis sur son trône Adès, le dieux des enfers et Pérséphone.

    Mourir c'est renaitre. Les mystères figurent le passage de la vie à la mort. Ils ont une signification humaine car on y trouve une figuration du mariage, de la mort, de la colère et la réconciliation. Dans ces rituels des spectacles sont montrées, les histoires sont mises en actes, et s'offrent à voir dans une étonnante alternance entre ombre et lumière.

    Orphée, le poète, l'aède, amène avec lui l'espoir de l'immortalité et l'harmonie de la musique avec sa lyre. Pour lui, dieu nous habite et c'est notre devoir de le libérer des chaines des Titans. Orphée descend chercher Euridice, mais il échoue pour toujours à la ramener à la lumière. Ses initiés exerçaient la mantique, -pratique dévinatoire- parce qu'ils communiquaient avec les âmes des morts et la thérapie par la lumière.

    Zeus le punit parce qu'il dévoile les secrets des morts aux vivants. On trouve ici une similitude avec le mythe de Nigeria, à propos de quelqu'un qui retourne dans le monde des humaints et qui brise le secret des morts, en initiant les vivants à l'art de la marionnette. Cela nous rappelle aussi Karagiozis, ancêtre du théâtre d'ombre. Le mythe des origines des ombres grecques nous rappelle les racines sacrées des marionnettes.

    La marionnette en elle a l'inscription de ce corps morcelé, relié et animé par la force du marionnettiste et la mémoire de son origine.

    A la Grèce antique, chez Platon, la marionnette s'appelle «miracle». On mesure la force et la faiblesse. Dans la caverne de Platon nous assistons à une situation étrange: Des hommes emprisonnés, enchainés, regardent un spectacle, des ombres qui défilent. Drôle de situation, tourner le dos au spectacle pour ne pas voir que les ombres des poupées, qui transportent des animaux en bois ou en pierre, des statues et d'autres objets. Les prisonniers semblent eux mêmes des marionnettes, qu'un invisible marionnettiste peut mettre en mouvement. Enchainés, ils regardent un théâtre d'ombre qui se déroule en répétition. Les hommes-marionnettes se souviennent de toutes les scènes, en effet, avec la répétition on apprend, on fait travailler sa mémoire sur le même enchainement. Mais la répétition est stérile si c'est pour faire les mêmes mouvements, créer les mêmes objets, remplir le temps avec des moments prévisibles.

    Il y a sortie de la caverne? Et si quelqu'un s'échappe et sort à la lumière en rencontrant «l'autre monde», le soleil et le ciel bleu, va-il revenir à la caverne? S'il revient et devient marionnettiste, est ce qu'il va montrer le même spectacle qu'avant, ou la mémoire de la lumière pourra-t-elle effacer la souvenir de la répétition des apparences?

    Le miracle se trouve ailleurs: c'est la liberté de l'homme (le joueur, le spectateur, l'homme-marionnette), quand il sort de sa prison. Platon accuse le corps qui est la prison de l'âme. La marionnette nous fait sortir de la prison du corps qui dans certaines conditions peut nous enchainer, en nous faisant emprisonnés sans espoir d'évasion.

    Le souvenir est une version de la mémoire qui accepte le trauma qui avec ses blessures nous fait différents. Là où le souvenir laisse ses traces, la continuité du même, l'espace habituel, le temps compté et calculé se fissurent. De cette fissure « l'autre » nous envahit: la marionnette incarne ce miracle de se souvenir. Cet art du «couvrir-découvrir», voiler-dévoiler, le montrer-cacher de la marionnette a une très grande force spirituelle et il est en lien étroit avec le sacré.



    BIBLIOGRAPHIE

    1. "Ο Διονυσος κάτω απο τ'αστέρια", traduction Κωστας Κουρεμένος, εκδόσεις Αλεξάνδρεια, 1993, traduction "Dionysos sous les étoiles" de Marcel Detienne

    2. "Ο Νάρκισσος στα ίχνη της εικόνας και του μύθου", της Πέπης Ρηγοπούλου εκδόσεις Πλέθρον, 2002

    3. "Le mythe de l'éternel retour, Archetypes et Répétitions" de Mircea Eliade, Gallimard, 1969"Ερωτ

    4. "Ερωτας και θάνατος στη δραματοθεραπεία", "Amour et Mort en dramatothérapie", Article de Dimitra Stavrou, (Διάλεξη στο 2ο Πανελλήνιο Συνέδριο Δραματοθεραπείας και Παιγνιοθεραπείας, Αθήνα: Χαροκόπειο Πανεπιστήμιο 26-28 Νοεμβρίου 2010)


    votre commentaire